/// Matelas de laine à sa mesure /// —- Encore en cours de rédaction —
Nouvel article du 29 Mai 2021 — Mis à jour le 21 Juin 2021 —
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Les matelas de laine étaient traditionnels autrefois, ils doivent être refaits régulièrement. Heureusement, il y a encore des gens comme Cécile qui savent encore les refaire. Il faut maintenir les traditions. Car, certains y reviennent pour des raisons de santé. Découvrons donc la réfection d’un matelas de laine.
J’ai fait l’expérience de filer de la laine de matelas, quand j’apprenais à filer… C’est plutôt difficile à travailler. Je ne savais pas à l’époque que j’aurais l’occasion de voir comment on refait un matelas de laine.
Les matelas de laine, je ne sais pas faire
Un jour, mon père m’a reprocher de trop parler de moi. Cette fois-ci, je vais parler surtout d’une amie.
Les matelas ne rentrent pas directement dans mes champs de recherches, mais ils utilisent des fibres. En outre, je suis sûre que cette expérience me sera utile.
Un peu d’histoire des matelas
Á nouvel article, nouvelle recherche d’informations sur le sujet.
Comme les textiles et la plupart des matières organiques, les systèmes de couchage ne laissent que peu de traces. Malheureusement, je n’ai trouvé que peu de documentation.
Lors de mes recherches sur Hal, auquel j’ai recours assez régulièrement, je suis tombée sur cette photo d’un détail d’un tombeau de Palmyre, montrant un matelas.
Un certain nombre de civilisations n’ont accordé que peu d’intérêt au confort. Cela semble notamment être le cas en Asie et en Afrique.
Monique raconte que dans sa jeunesse, les matelassiers faisaient le tour des fermes chaque année et s’installaient pour le temps de refaire tous les matelas demandés, les familles étaient nombreuses…
Différentes matières
De nombreuses matières végétales ont été mises à contribution selon les pays: balles de pailles de blé, feuilles de maïs, kapok, fibres de coco…
On m’a aussi parlé de matelas en fibre de lama, à Mamiña, qui ont malheureusement été jetés à la décharge…
Autrefois, les moutons produisaient de la laine et on s’en réjouissait. Maintenant, ils continuent à en produire, mais on essaie d’éviter cette production naturelle. Le coût de la tonte annuelle et parfois même semestrielle est plus élevé que la valeur de la laine brute sur le marché.
Valoriser un «déchet»
Cette manne est devenue pour beaucoup de producteurs ovins un déchet, une charge dont il est difficile de se débarrasser.
Certains éleveurs s’en débarrassent en essayant de la brûler, or la laine brûle très mal. Pourtant, il y a de nombreuses solutions pour valoriser cette matière première:
- feutre,
- isolation,
- paillage sur les cultures,
- filature et tissage pour les laines de meilleures qualités…
Conclusion, les moutons à bonne laine deviennent de plus en plus rares. Elle devient de plus en plus courte et souvent rêche et grossière, donc moins valorisable en filature. Quel dommage.
Au Chili, de nombreux petits agriculteurs éliminent leurs brebis rustiques traditionnelles à belle laine, souvent de couleur (grise ou noire, recherchée par les artisans) et les remplacent par des brebis sans laine sous le ventre et à laine courte. Cela me semble une vision à très court terme.
Ce matelas de laine de deux places utilise environ 26 kg de matières premières dont un quart de crin, soit la toison d’au moins 8 ou 9 moutons. Peu importe que la laine provienne d’un bélier ou d’une race à laine rêche. Pour cette utilisation, on est moins regardant que pour la filature.
Il est tout de même recommandé de prendre les laines du dos qui sont les plus longues.
Pourquoi refaire un matelas de laine?
Pour maintenir les traditions
Pour beaucoup, les matelas de laine et leur régulière réfection font partie des souvenirs d’enfance. En outre, il est bon de maintenir certaines traditions…
Pour des raisons de santé
Si certains peuvent être allergiques à la laine, d’autres sont allergiques aux matelas à base de pétrole.
Au local de mon ami Angel, Rincón de Angel, nous avons plus d’une fois vendu de la laine de mouton lavée pour refaire un matelas d’enfant ou des oreillers pour la grand-mère.
Pour des raisons écologiques aussi
Les matelas en mousse sont difficilement recyclables comme l’explique Wikipedia et partent le plus souvent encombrer les décharges.
En revanche, un matelas de laine, couvert d’une toile en coton cousue avec des fils de lin est complètement biodégradable. La laine peut être réutilisée plusieurs fois après cardage.
Quand elle arrive en bout de course elle peut terminer en paillage sur des cultures, en les protégeant de la sécheresse. C’est au moins aussi efficace que le BRF. Je l’avais fait à petite échelle avec des déchets de cardage pour filer, à Mamiña.
La toile est toujours un peu trouée, à cause des bouffettes (petits pompons), mais je pense la recycler tout de même, car sa texture est belle.
Pour utiliser d’anciens lits hors standard
Dans une société aussi standardisée que la nôtre, un certain nombre de literies ne peuvent plus trouver de matelas.
Refaire un matelas de laine permet de l’adapter à des mesures qui sortent de l’ordinaire, du standard, de la norme actuelle.
Monique a fait l’inventaire des matelas hérités de ses parents, il semble qu’il n’y en avait pas deux aux mêmes dimensions.
Cécile a donc tenu compte des mesures nécessaires pour préparer les toiles de ce matelas.
Qui est Cécile, la tapissière idéale pour ce matelas de laine?
Cécile est voisine et amie de Monique depuis plus de 30 ans.
Heureusement pour elle, Cécile ne fait pas que des matelas de laine… Je vous invite à visiter son facebook où vous pourrez découvrir la variété de meubles qu’elle sait restaurer, recycler et revaloriser. Dans on atelier, il y aussi un atelier de peintre…
Ainsi, elle propose des restaurations créatives de sièges qui changent d’allure.
En outre, pour perpétuer les traditions de son métier, elle donne des cours.
Comment refait-on un matelas de laine?
D’abord Cécile à pris les mesures du nouveau matelas. Puis, elle a préparé les toiles avec leurs ourlets et les indications de positionnement des gros bourrelets et des bouffettes. Elle a aussi préparé des poignées bien pratiques qu’elle coudra en dernier.
Les préparatifs pour les matelas de laine
Les clayettes
Cécile, m’avait prêté des clayettes pour sécher la laine, mais elles ont disparu.
Gérard, chez qui j’étais avant de retourner à Falaise chez Monique pour la réfection du matelas de laine, les a refaite en mieux. Maintenant, leurs petites pattes se replient.
Cependant, elles n’ont pas été nécessaires, car la laine venait en quantité suffisante et était très propre. Il n’y a donc pas eu besoin de la laver.
Le dépeçage du vieux matelas de laine
Avant l’arrivée de Cécile, avec Monique nous avons descendu un premier grand matelas.
Alors nous avons décousu et défait tous les bourrelets de la toile pour libérer la laine qui sera réutilisée.
Elle est bien blanche (ce qui n’a pas d’importance pour l’intérieur d’un matelas), elle est bien propre, peu de débris végétaux, pas de fibres synthétiques mélangées…
Je la trouve un peu rêche et courte pour la filer, mais ce n’est pas le but.
Le montage de la table de travail
Cécile est arrivée, elle a vite déchargé tout son matériel de travail. Puis, elle a organisé son plan de travail, la table où elle installera la première toile.
La pesée de la laine
Puis on pèse la laine, pour arriver aux 21 kg de laine et aux 5 kg de crins prévus pour ce matelas.
La pesée de la laine permet aussi de répartir les quantités de fibres pour chaque couche.
Comme il manquait 2,5 kg de laine, nous avons ouvert un autre petit matelas pour la récupérer.
Mise en place de la toile du matelas de laine
Puis, Cécile installe la première toile sur son plan de travail. Cette étape doit être exécutée avec minutie.
Le cardage de la laine
Quelle que soit la provenance de la laine, elle doit être propre (c’est déjà le cas) et cardée pour défaire les paquets qui s’étaient formés lors de l’usage du matelas.
Lâ, on n’a passé la laine qu’une seule fois dans la cardeuse. C’était suffisant. Moi, pour filer, je l’aurais passée plusieurs fois. Mais, d’habitude, le passage en cardeuse doit éliminer des débris végétaux absents ici.
Étape par étape
Donc, on carde d’abord la laine de la première couche. Les différentes couches sont cardées au fur et à mesure.
La cardeuse est pourvue de clous féroces, il convient de faire attention de ne pas se faire attraper la main qui alimente le système en laine par cette mâchoire acérée.
La mise en place de la première couche de laine
Une fois toute la première couche de laine cardée, Cécile la répartit par étape sur la toile. Cela suppose aussi des temps d’observation pour repérer les éventuels défauts et les arranger avant qu’il ne soit trop tard.
Du crin pour ce matelas de laine
Le matelas d’origine n’avait pas de crin. Cependant, Cécile vient de m’expliquer que «le crin donne de la fermeté et évite le tassement trop rapide de la laine à l’endroit du corps allongé» .
Ce n’est donc certainement pas par économie, au contraire car la laine était recyclé et le crin un apport, ici.
Pour un bon résultat, on ne joue pas à l’économie.
Le cardage du crin
Comme le crin venait compacté dans son emballage, il doit donc aussi être cardé avant d’être mis en place.
La mise en place du crin
Une fois cardé le crin, Cécile le met en place au-dessus de la première couche de laine.
Peu à peu, Cécile met en place le crin.
Cécile va bientôt pouvoir ajuster cette couche, avec la même attention que pour la précédente.
Deuxième couche de laine
Après la mise en place du crin, vient la deuxième couche de laine que l’on vient de carder à son tour.
Toutes ces étapes de répartition de couches de fibres doivent être faites avec beaucoup de minutie pour éviter les trous et les bosses qui ne pourront pas être rattrapés par la suite et ne feront que s’aggraver à l’usage du matelas.
Je comprends bien ces difficultés
Car, je pourrais les comparer à la répartition des couches de laine pour le feutre. Quand on travaille avec du tops (laine en ruban, produit intermédiaire lors de la filature industrielle, souvent utilisé pour le feutrage artisanal), ce n’est pas trop difficile.
Quand on travaille avec de la laine préparée à la main, les trous et les bosses apparaissent au feutrage… Il est difficile de reboucher les trous et d’éliminer les bosses, d’autant que ces inégalités réduisent la solidité de la pièce.
Pose de la deuxième toile
Enfin, vient le moment crucial de la pose de la deuxième toile, sans bousculer le précieux sandwich géant.
Les coutures du matelas de laine
Ces étapes non seulement exige de la précision, mais aussi de la force.
Union des deux toiles
L’union des deux toiles commencent par l’insertion de grosses épingles qui maintiendront les toiles jusqu’à la fin de la couture.
Ces grosses épingles appelées houzeaux m’ont beaucoup plu. Je m’en suis achetée une boîte, je pense les utiliser bien différemment.
Alors, la mise en place de ces houseaux requière de la force car la toile est solide et très tendue par las couches de laine. Cécile en met tout autour du matelas pour que la laine ne s’échappe pas.
Attention aux doigts
Après la mise en place des houzeaux, Cécile commence la couture avec un fil de lin très solide. Alors, elle doit protéger ses mains avec des sortes de gants en cuir qui lui permettent de pousser l’aiguille avec la paume de la main. Cette couture est longue car les points doivent être assez serrés et chaque point est une lutte contre la résistance du rembourrage.
Malgré toute son attention, il lui est arrivé plusieurs fois de se piquer les doigts.
Pour chaque type de couture, Cécile utilise des aiguilles différentes, des droites, des très longues, des semi-circulaires. Tous ces outils ont des noms traditionnels bien précis qui constituent la langue de l’artisan. Il serait dommage que ces vocabulaires adaptés soient oubliés. L’utilisation de périphrases n’apporte rien à la clarté du discours, bien au contraire.
Mise en place des bouffettes
Cette étape indispensable est une véritable épreuve de force et de précision. Cécile a même dû se faire aider par Monique.
Il s’agit de mettre en place de petits pompons à des intervalles réguliers en perçant tout l’épaisseur du matelas. Le fil de lin très solide doit faire un aller-retour sur les points marqués sur la toile sur chacune des faces.
La longueur des fils de lin sera ajustée à plusieurs reprise.
Pour cette opération délicate, Cécile utilise une grande aiguille de plus de 40 cm. Les lignes de bouffettes proches du bord sont les plus faciles à mettre en place, car elles sont plus accessibles. Mais, les mouffettes du milieu sont quasiment hors de portée.
Dans ces conditions, il est plus difficile de planter l’aiguille verticalement pour atteindre précisément le point opposé alors invisible. La pression de la laine fait que si l’aiguille a dévié sa course, on ne peut pas la redresser. Il faut donc la relever et recommencer.
Pliage des coins
Une fois la couture principale terminée, Cécile replie les coins vers l’intérieur du matelas et les couds.
Les bourrelets
Ils servent à renforcer le matelas en lui donnant sa forme et à empêcher que la laine se déplace à l’intérieur.
Pour se guider, Cécile avait marqué les toiles. Les points sont plus espacés et sont regroupés.
Une fois les bourrelets du tour du haut terminés, il faut retourner le matelas et recommencer avec la deuxième ligne de bourrelets.
Finis les bourrelets, Cécile ajuste à nouveau les fils des mouffettes et coud des poignées bien utiles pour les déplacements et pour retourner le matelas.
Refaire un matelas de laine est un travail très physique
Enfin terminé, le matelas de laine revient sur son sommier.
Comme vous pouvez le constater, ce travail est très exigeant tant au niveau physique que de la précision et du tact nécessaires pour un bon résultat final.
Recyclage de la toile de l’ancien matelas de laine
J’ai trouvé la texture de la toile de l’ancien matelas très belle.
Malgré les petits trous, j’ai décidé de la recycler. J’ai éliminé les bandes trouées correspondant aux coutures et aux bourrelets.
Avec Monique, nous avons préparé un ecoprint.
Voici, le résultat. Vu le système de pliage que nous avons utilisé pour faire tenir la pièce dans la casserole, certaines parties sont parfois plus belles sur l’envers.
Alors, j’ai découpé la toile après rinçage en 6 morceaux, pour faire des sacs.
Une robe en ecoprint pour Cécile
Il y a longtemps, Cécile m’avait passé une de ses robes en lin blanc pour que je la teigne.
Alos, avec Monique, nous l’avons traitée en ecoprint aussi.
Conclusion
Enfin, ce matelas n’a pas seulement pris un coup de jeune. Mais, il a gagné des poignées qui aideront lorsqu’il faudra le retourner ou le déplacer.
En outre, il a été renforcé avec du crin, ce qui permet un usage plus long.
Bien que cela puisse sembler long et complexe (environ 4 jours de travail), aucune étape ne doit être éliminée pour un bon résultat.
Refaire un matelas est un travail très physique, mais qui nécessite aussi de la patience et du tact pour bien répartir les matériaux car tout insuffisance ou excès de fibres dans certaines zones provoquerait rapidement des sensations désagréables pour l’usager.
Voici un matelas recyclé… de bonnes nuits pour Monique.