/// Echarpe de A à Z /// —- Encore en cours de rédaction —
Nouvel article du 11 Mai 2021 — Mis à jour le 26 mai 2021 —
Prochain article – Laver la laine ou Matelas de laine à la mesure
Organisons donc des ateliers! C’est facile – +33 7 69 905 352
Une écharpe, une fois n’est pas coutume, je vais vous décrire en détails la création de cette écharpe, en partant de la tonte du mouton, jusqu’au produit fini. Cet article fait suite à celui sur le filage. Il le complète avec une nouvelle expérience lainière. Si vous avez des doutes sur certains termes techniques que j’emploie, ils sont détaillés dans le précédent article.
Je continue mes expériences de Wwoofing et j’arrive chez Gilles Michaudel à Cormes dans la Sarthe. J’aurais pu continuer chez Aline à Sérans et chez Monique à Falaise, mais la prise de contact a été si bonne avec Gilles que je ne pouvais pas manquer de connaître sa ferme, d’autant plus que je voulais en savoir plus sur les moutons.
Cela fut une très bonne idée.
Laines pour une écharpe
Gilles élève des moutons pour la viande, mais ses brebis produisent beaucoup de laine de bonne qualité. Elles en produisent tant, qu’il doit les tondre deux fois par an.
Un vilain virus dont on parle trop actuellement a aussi fait qu’il n’a pas pu vendre les 500 kg dont il dispose actuellement.
Il m’en a donné quelques kilos pour l’essayer.
Elle est très agréable à filer, si agréable que je n’avais jamais filé aussi fin. Elle peut être aussi très blanche. Voici deux bonnes laines: la Shropshire a été lavée au shampoing et la Thones et Marthod à la lessive de lierre.
J’ai tellement apprécié cette laine, que je viens de filer écheveau en y ajoutant du doux poil de lapin angora. On n’associe pas des fibres si luxueuses avec n’importe quoi.
La tonte pour une écharpe
Dans les 500 kg de laine en attente de clientèle, je n’ai pas trouvé de laine de couleur, il y en avait certainement, cachée au fonds d’énormes sacs. Les toisons étaient bien roulées, je ne voulais pas tout désordonner.
Choix de la laine
Il y avait un jeune bélier marron, presque noir, avec une touffe de mèches de laine beige sur la tête, surnommé le « Rasta« . J’avais très envie de filer sa laine.
Gilles a accepté de le tondre le dernier jour, je lui enverrai l’écharpe en échange.
En réalité, sa laine est tacheté presque noire et grise, on le voit marron, car la pointe des mèches laine s’est décolorée au soleil.
La race Thones et Marthod
Avant d’arriver chez Gille, je ne savais rien de la Thones et Marthod. Je vous invite à voir cette petite video pour en avoir une petite idée.
Qualités de la Thones et Marthod
Contrairement à ce qu’ils disent dans la video, sa laine a vraiment beaucoup de qualités. Il suffit de savoir la travailler. D’ailleurs, il n’existe pas de laine parfaite. Ainsi, la mérinos est souvent très courte et perd près de la moitié de son poids au lavage.
Elle peut aussi être d’une grande blancheur. Ce n’est pas toujours le cas des laines réputées. En outre, la blancheur des fibres pose de sérieux problèmes. Michel Pastoureau, grand historien des couleurs parle de « teindre en blanc« , ce n’est pas une blague.
J’ai aussi été très heureuse de retrouver l’apparence et le toucher presque lisse (proche des fibres de camélidés) d’une laine que mon amie de Paipote (Nord du Chili) m’avait donnée il y a longtemps. Cette laine avait une gamme très variée de couleurs allant du blanc au noir en passant par tous les tons de gris, de beige et de marrons, mais avec l’odeur caractéristique des moutons, se filait très bien.
La viande aussi…
Je peux aussi témoigner que sa viande est excellente, même si les gigots ont des os trop longs pour les fours! Il semblerait que cette race ait fait les frais d’une normalisation exagérée.
Le cardage
Comme la plupart du temps, j’ai cardé à la main.
Laine propre
Avec la laine blanche, cela s’est très bien passé, je l’avais bien sélectionnée. Les moutons, dans cette ferme, sont très propres car ils vivent à l’extérieur.
Généralement, les moutons élevés en enclos ou en bergerie fermée ont une laine avec beaucoup de débris de paille ou de luzerne, ce qui complique le cardage.
Laine sale
J’ai des souvenirs de laine de moutons à Mamiña ou à Parca, au Nord du Chili pour lesquelles le temps passé à éliminer les débris de végétaux étaient fort long.
Pour la laine noire, cela a été un peu plus compliqué.
La laine était de bonne qualité, mais parfois une collée. Peut-être que sa couleur sombre a fait que ce bélier transpire plus. Je l’ai donc rincée deux fois à l’eau du robinet, sans lessive. Cela n’a donc pas éliminé la lanoline.
Je l’ai laissé sécher et je l’ai cardée encore un petit peu humide. Le plus gros de la terre était parti et les débris de végétaux tombaient facilement quand j’étirais les morceaux de toison. Les derniers déchets se sont détachés lors du filage et du lavage.
Laine rincée
J’en avais choisi aussi une partie un peu plus courte, mais légèrement beige sur les pointes. Je ne l’utiliserai pas pour l’écharpe. Quand j’ai voulu la préparer pour la filer, elle semblait un peu feutrée. Alors, je viens d’appliquer ce que j’ai fait pour la laine noire, mais à l’eau de pluie cette fois-ci.
Le résultat est incroyable. Cela va être un plaisir de la filer.
Tricoter sans carder
J’ai aussi profité du fait que certaines laines étaient un peu collées pour les crocheter en mèches légèrement torsadées, sans les filer. J’ai lavé ce bonnet après l’avoir tricoté, il n’a pas feutré.
Le filage
Lors de cette expérience, je ne disposait pas de rouet, j’ai donc filé à la main. C’est beaucoup plus long, mais cela permet de mieux apprécier les fibres que l’on file.
J’ai donc filé de la laine blanche, de la laine noire et blanche et enfin de la laine noire.
Les couleurs
J’associe ces laines lors du doublage pour obtenir 4 tons:
- Blanc
- Blanc avec un peu de noir
- Noir avec un peu de blanc
- Noir
J’ai filé la laine sale comme à mon habitude, sauf la noire que j’ai décidé de rincer en cours de filage.
La pesée
Comme il s’agit pour moi d’une nouvelle sorte de laine, j’ai aussi pesé avant et après lavage, pour savoir quelles sont les pertes.
Le lavage
Pour laver, j’ai fait une lessive de lierre. Monique avait arraché deux sacs de lierre dans son jardin, j’en ai profité.
J’indique la recette de la lessive de lierre dans l’article qui lui est consacré.
La laine est en écheveaux.
D’abord, un premier rinçage double à l’eau froide, avec un quart d’heure de trempage.
Puis lavage à la lessive de lierre. Rinçage.
Dernier rinçage supplémenté en vinaigre blanc, pour adoucir l’eau très calcaire de Falaise. Cela assouplit la laine.
J’ai profité de cette dernière eau de rinçage vinaigrée pour rincer les derniers ecoprint que nous avions faits. Cela ravive les couleurs.
Le séchage
Les écheveaux sont déjà entrain de sécher.
Une fois les écheveaux secs, j’en fait des bobines que je pèse à nouveau.
Voici les résultats:
Le temps
Alors, j’ai mis presque 15 jours pour filer et retordre 350 g de laine.
J’ai bien sûr fait aussi beaucoup d’autres choses pendant cette quinzaine, car filer au fuseau est fatigant, même si la laine est extraordinaire. J’ai entre autre trié des milliers de photos prises depuis plusieurs mois. Cette étape était absolument nécessaire pour l’illustration de cet article, du précédent, de ceux qui vont suivre.
Je dois aussi mettre à jour avec de nouvelles expériences des articles anciens tels que ceux sur les ecoprint ou les mordants.
Le tissage de l’écharpe
Tricoter au crochet aurait pu être plus rapide, mais aurait utilisé le double ou le triple de laine.
Quel métier choisir?
J’aurais pu la faire d’une pièce avec mon métier Tissanova, mais je voulais la tisser seulement avec des laines de chez Gilles. Je ne file pas encore assez régulièrement et assez fin pour pouvoir utiliser mes laines comme chaîne pour ce type peigne. La chaîne aurait sans doute beaucoup trop souffert en frottant continuellement sur les rainures du peigne qui sont très étroites.
Pourquoi?
Je décide donc d’utiliser mon bon vieux cadre à tisser de voyage préféré, mon petit métier à clous de 20 x 20 cm.
C’est l’idéal pour tisser des laines un peu rustiques, les irrégularités ne se bloquent pas dans le peigne ou les lisses.
Cela me permet aussi de ranger dans ma valise un travail non fini.
Et puis, j’ai hâte de tester une nouvelle solution pour tisser plusieurs carrés à la suite sans devoir les unir.
Les différentes unions possibles pour une écharpe
J’ai l’embarras du choix, mais j’ai choisi la nouveauté.
Couture simple
C’est bien sûr possible, mais je ne pratique pas cela. J’ai impression que ce n’est pas solide, j’ai des difficultés à cacher mes coutures, il reste des noeuds… Je n’aime tout simplement pas coudre.
Couture au crochet
C’est joli, cela fait un petit relief décoratif, mais le crochet utilise beaucoup de laine. J’ai donc cherché d’autres solutions.
Voici un autre exemple de couture au crochet.
Tisser en s’accrochant à la trame du carré antérieur
J’ai découvert cette technique il y a longtemps, à la bibliothèque du musée d’archéologie d’Antofagasta, grande ville du Nord du Chili.
Cette technique peut s’utiliser aussi bien pour la trame que pour la chaîne. Je l’ai souvent utilisée pour de petits ponchos.
Mais, il faut parfois faire varier les techniques
Nouvelle idée
En me réveillant, ce matin-là, j’ai eu une nouvelle idée. Pourquoi ne pas couper des fils de chaîne de la longueur de l’écharpe, plus les franges avec une certaine marge.
Nouer les fils par paires avant le premier et après le dernier clou de chaîne, laisser pendre le reste et tisser le premier carré. Celui-ci reste bloqué par les noeuds, on le sort du métier.
On place les noeuds de fin de chaîne du premier carré en début de chaîne du deuxième et on ferme par un noeud après le clou de fin de chaîne, on tisse.
Et ainsi de suite.
Écharpe nouvelle technique
Donc, cette écharpe aura des franges.
J’ai décidé de faire des rayures mettant en valeur les différentes laines que j’avais filées.
J’aime beaucoup le sergé 2/1, c’est un point rapide, facile à pratiquer sur ce genre de métier. En outre, l’effet de diagonal est intéressant.
Je lève un fil de chaîne et laisse deux autres (au lieu d’un) sous l’aiguille. Je décale le motif à chaque rang d’un fil de chaîne, toujours dans le sens. Alors, cela donne l’effet diagonal, différent entre l’endroit et l’envers.
Avec cette photo macro, on voit mieux l’effet diagonal.
Normalement, je mets 2 jours pour faire ce genre d’écharpe.
Petite difficulté
J’avais sous-estimé la longueur de laine pour la chaîne, j’ai donc dû faire des ajouts. Heureusement, les noeuds se sont échelonnés sur deux carrés, cela a permis de mieux les cacher.
Finitions
Je fais un tour au crochet en point de « crabe« , point qui part en marche arrière sur les deux côtés longs et en mailles coulées juste avant les franges.
Dernière pesée
Poids final de l’écharpe: 150 grammes.
Il me reste 200 grammes pour en faire une nouvelle avec une autre disposition des couleurs.
Habituellement, on réserve les meilleures laines pour les écharpes, car elles sont au contact de la peau. Je n’ai pas été déçue par celle-ci. Même la laine du bélier était très douce, car il était encore jeune.
Conclusion
Cet article n’est pas publicitaire, il relate des expériences que je tenais à vous faire connaître. Un grand remerciement à Gilles Michaudel de Cormes, à Monique de Falaise et à Gérard qui les ont rendues possibles.
Comme je suis une artisane itinérante, cette écharpe a démarré sur un mouton de Gilles, la laine a été filée, lavée et commencée à être tissée chez Monique à Falaise, finie chez Gérard à Chatenoy.