Les arbres comme matière tinctoriale
Les arbres sont de bons fournisseurs de matières premières pour la teinture. Certaines espèces ont été mise en danger, ils ont été surexploités. L’histoire montre que le commerce des matières tinctoriales a fait bien des dégats du point de vue écologique. Beaucoup d’espèces courantes peuvent nous servir, pourquoi aller chercher plus loin?
Certains arbres sont encore cultivés pour la teinture et les tanneries. Beaucoup de bois contiennent des tanins qui sont utiles pour ces deux activités.
Selon les espèces d’arbres, les différentes parties peuvent donner différentes tonalités.
Les feuilles
Cette partie de l’arbre est renouvelable, ont peut profiter des tailles annuelles et de la chûte des feuilles à l’automne. Et comme un arbre donne beaucoup de biomasse, l’on a vite fait de remplir une casserole pour teindre.
En petites quantité, l’écoprint est une technique qui permet de mettre en valeur tous les détails de chacune d’entre elles. Même une simple aiguille de pin australien peut donner des résultats inattendus.
Les arbres fruitiers
J’ai fait quelques tests avec des feuilles de cognassiers, quand je vivais à Mamiña, avec des feuilles d’abricotier, de kaki, d’avocat, de néflier quand j’étais à Longotoma. Je n’ai malheureusement pas étiqueté les échantillons.
Les indigotiers
Les indigotiers sont cultivé pour leur feuillage qui une fois fermenté donne de l’indigo, qui est à la fois pigment et teinture. Cette teinture ne se fait pas à chaud, mais dans un bain tiède, fermenté et alcalin.
Outre la teinture, les feuillages de d’indigotiers peuvent, comme pour beaucoup d’arbres, servir de fourrage pour les animaux.
Les indigotiers on besoin d’un climat chaud et humide pour pousser et donner de l’indigo. Pour les autres climats, il y a d’autres plantes : persicaire, strobilanthes, pastel…
Les eucalyptus
Au Chili, nous avons que deux ou trois espèces, surtout le globulus, mais ils sont très intéressants du point de vue tinctorial, bien que très mauvais pour les sols.
En Australie, il y a plus de deux cents espèces d’eucalyptus, je suis très curieuse de voir cela. Susan Fell Mclean de Gondwana fait de merveilleux écoprint en les utilisant et vend des colorants à base de ces arbres.
Le pin australien ou cuarasiña
J’ai beaucoup utilisé cet arbre au pied de la colline ou j’habitais. Il était grand et gènait le passage des camions, régulièrement ils lui arrachaient des branches, je les récupérais. C’était une source inépuisable.
J’ai été très contente d’en retrouvé près du Lac Andraikiba, là où habite mon ami Hilaire, j’ai beaucoup aimé les traces fines et élegantes que laissent les aiguilles, passées à la soupe de clous, en ecoprint.
Le poivrier rose (schinus molle)
Je l’ai beaucoup utilisé à Mamiña, mais on le trouve encore en zone centrale (j’en ai vu à La Ligua et à Limache), c’est un très bel arbre, au bois très léger et odorant qui orne la place centrale de Copiapó. Il teint d’un très beau jaune et aussi d’un joli vert encore lumineux au fer.
Les arbres sacrés teignent aussi
Le Canelo, arbre sacré des Mapuche, teint très joliment en jaune, habituellement en association avec le noisetier du Chili.
Autres arbres
Boldo, molle, litre, peumo, guayacan, buddleya…
L’écorce
Encore une fois l’eucalyptus
Les écorces d’eucalyptus sont faciles à obtenir, nos eucalyptus les perdent naturellement, ils ne souffrent donc pas quand on la récupère. Elles libèrent de grandes quantités de teinture, laisser tremper quelques jours pour obtenir de meilleurs résultats, l’une de mes premières teintures à Longotoma. Pas de mauvaises surprises, cela marche à tous les coups.
Autres essais
Je n’ai fait que peu d’essai avec des écorces pour ne pas abîmer les arbres. Mais j’ai récupéré des écorces de Luma sur du bois de chauffage, et cela m’a donné des beiges.
Le bois
Teindre avec de la sciure
J’ai testé la sciure de mélèze, déchets de production d’un artisan de Puerto Montt, le résultat a été très intéressant, il faut faire attention à protéger la laine de la sciure qui s’accroche sur la laine.
Le bois de campêche
Il est vendu en brisures, je me suis fournie chez Couleur Garance, j’ai été surprise par la quantité de bains que j’ai pu faire avec aussi peu. Même problème qu’avec la sciure, cela s’accroche dans la laine. Il est réputé petit teint, mais les couleurs m’ont beaucoup plu.
Les racines d’arbres
Je n’ai jamais essayé de teindre avec des racines d’arbres, vu que j’essaye de respecter le plus possible la nature, arracher des racines peut tuer un arbre, pourquoi le faire, s’il donne déjà tant de possibilités sans le mettre en danger?
Les fleurs d’arbres
J’ai fait peu d’essais avec des fleurs d’arbre, j’ai essayé les fleurs du quintral seules, le résultat est le même si j’emploi la plante parasite complète.
A Santa Fe, Argentine, lors de l’atelier à La Redonda, nous avons essayé les fleurs tombées de jacaranda et à La Ligua les fleurs de ceibo de la place.
Le,sophora est connu pour donner un beau jaune, mais je n’ai pas eu l’occasion de le rencontrer.
Il vaut mieux travailler avec des fleurs fanées, tombées de l’arbre, ainsi on ne pertube pas la fructification.
Les fruits
- Brou et coquilles de noix,
- Coquilles de noisettes
- Noyaux et écorces d’avocats
- Noyaux de mangues et autres fruits
- Glands, fènes, pommes de pin
- Enveloppes des chataignes et marrons
- Epluchures de pommes, coings…
- Ecorces de grenade
- Kaki
- Fruits pas mûrs
- Gousse de graines de tara
- Graines d’acacias, mimosa
Michel Garcia, m’a fait une démonstration très intéressante de teinture au kaki, en l’utilisant comme mordant.
Les gousses de tara sont intéressantes, nous les avons utilisées lors du cours à Pica, nous avons épluché les graines, une dame les a semé, elles ont germé, nous avons teint avec leur gousse. Elles contiennent des tanins, nous avons obtenus des beiges et des gris en mordançant au fer, normalement on aurait dû obtenir un rouge pourpre, un ami artisan, m’a raconté qu’il avait tanné des cuirs au tara et avait écrasé les gousses avec un outil en fer et ses cuirs avaient été teints en plus d’être tannés.
Arbres à savon
Dans toute la zone centrale du Chili pousse le Quillay (ce qui signifie savon en mapudungu). L’écorce de cet arbre médicinal et mellifère contient beaucoup de saponine. On en fait des shampoings et on l’utilisait pour laver la laine. Il est aussi sensé protéger la laine des mites.
Parasites des arbres
A Antsirabe, Madagascar, mon ami Hilaire teint avec des champignons qui poussent sur les eucalyptus qui donnent de très jolis marrons. Nous sommes allés en chercher, il n’y en avait pas, je n’ai pas pu les photographier.
Les galles du chêne sont bourrées de tanins, elles servent de mordant naturel. Elles sont produite lors de la ponte d’une guêpe, ce qui crée des boules sur les rameaux de l’arbre qui tente de se défendre.
En zone centrale du Chili, il y a le quintral qui pousse sur de nombreuses espèces d’arbreet notamment sur le molle, donne de jolis marrons roux très lumineux, le résultat varie selon l’arbre hôte du quintral, sur certains arbres, cela ne donnera que du beige.
Les résines d’arbres
Beaucoup d’arbres donnent des résines utiles, notamment certains acacias qui donne la gomme arabique. Celle-ci se dilue dans l’eau et permet d’épaissir des teintures pour imprimer ou peindre sur tissus et pour faire des encres naturelles.
Conclusion
Il y a beaucoup à explorer… Cet article est destiné à s’allonger considérablement lors de mon voyage autour du monde, j’espère rencontrer de nombreux arbres tinctoriaux et vous les faire connaître…
Comme ils sont admirables ces arbres, je ne peux que vous conseiller d’écouter cette conférence de Francis Hallé et un peu de poèsie avec Gilles Servat.