// Déchets bons pour teindre ///
Article créé le 12 janvier 2018, dernière mise à jour le 12 octobre 2022
Je suis en Europe jusqu’au 11 novembre 2022, date de retour au Chili – Beaucoup de nouveautés
Organisons donc des ateliers! C’est facile
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Plusieurs nouveaux articles sont en cours de rédaction et seront bientôt publiés.
Des déchets tinctoriaux
Teindre avec des déchets peut être très facile, simple, économique… C’est une forme de recyclage et de mise en valeur efficace. N’en attendez pas les rouges et le bleu, de tout temps des plantes ont été cultivées pour cela… Mais vous aurez des jaunes, des verts pâles, des verts olives-bronze, des marrons, des beiges, des gris, toute la gamme classique des teintures naturelles…
Aller au marché et revenir avec des teintures-déchets
Au marché ou chez les marchands de légumes, on peut récupérer les pelures d’oignons, les queues et feuilles d’artichauds, les fanes de carottes, des légumes trop fanés, pommes piquées, avocats trop mûrs… j’ai même teint avec du coriandre qui avait jauni et était invendable, mais a teint en jaune.
Je n’ai pas encore essayé, mais les feuilles de laitue, blettes, épinards… devraient aussi donner des jaunes.
Il est donc très intéressant d’avoir de bonnes relations avec son marchand de fruits et légumes, une bonne occasion pour abandonner le supermarché… Cela peut être une bonne occasion de chercher à se fournir en circuit court.
Il ne faut pas hésiter parfois `mettre sa honte dans un mouchoir et ranger le tout dans sa poche. Par expérience, je sais que les écorces de citron teignent. Un matin, au petit supermarché de Gletterens, les employés triaient les invendus de fruits et légumes et je me suis permise de demander les citrons qui allaient partir à la poubelle. Ma demande a été accueillie favorablement.
Un autre moyen d’obtenir des déchets alimentaires, en particulier, avec les restaurants pour les épluchures d’oignons, les vendeurs de jus de fruits naturels pour les noyaux de mangues, d’avocats, de pêche, d’abricots… les écorces de citrons, oranges, pamplemousses, les épluchures de pommes, coings, poires, avocats… tout cela doit être essayé.
Si vous avez des arbres fruitiers, souvent, il perdent des fruits avant maturation, ces petits fruit sont en général bourrés de tanins, il est donc intéressant de les ramasser pour faire des essais de teinture.
A Puerto Montt, il font beaucoup de chicha à base de pommes, certaines femmes utilisent les restes de pommes écrasées pour teindre.
Les noyaux de mangues m’ont donné de très bon résultat quand je vivais à Mamiña.
Les épluchures d’oignons sont très intéressantes, surtout avec les vieux oignons qui ont été gardés pendant l’hiver. Il faut laisser tremper pendant plusieurs jours avant de teindre, et laisser mijoter le plus longtemps possible. On m’a mentionné plusieurs fois la coutûme de teindre des oeufs à Paques, avec des épluchures d’oignons ficelées autour des oeufs.
Laissez tomber les feuilles de betteraves, ceux qui en parlent ont seulement «entendu le coq chanter» (expression chilienne siginifiant que l’on ne sait pas de quoi on parle). Dans le meilleur des cas, on obtiendra un jaune pâle très décevant, le rose partant au premier rinçage. Je fais souvent la démonstration lors des cours. Cela peut teindre des sels de bains, mais le choux rouge, m’a donné de meilleurs résultats, j’avais aussi essayé les cerises.
Le choux rouge et les différentes baies qui tachent bien, risquent d’être aussi décevants, vu leur instabilité et leurs variations en fonction de l’acidité, lors du lavage. Mais cela peut être mis à profit pour des expériences avec des enfants. J’en parlerai certainement dans un prochain article.
Songez à garder les coques de fruits sec (noix, pistaches, noisettes, chataignes…). Ces fruits sont excellents pour la santé et leurs coques sont bourrées de tanins.
Les feuilles toxiques de rhubarbes donnent de jolis jaune ocre, sans danger.
Les déchets «mauvaises herbes» profitons-en
Vive les chardons
Ils teignent en jaune, verts et gris selon les mordants. Vous aurez la surprise de découvrir qu’ils sont tout aussi piquant cuits que crus.
Les coquelicots
D’après Dominique Cardon, leurs pétales teignent en rouge, je n’ai pas encore essayé, il en faut de grandes quantités et au Chili les coquelicots sont mauves !
Je les ai cueilli, jour après jour à Nemours et j’ai testé à Gletterens.
Les ronces
Les jeunes rameaux donnent de très jolis jaunes, vert olive et gris, selon le mordant, il en sort une très bonne odeur de confiture de mûres. Comme pour les chardons, les épines résistent à la cuisson. Les mûres comme toutes les baies sont plutôt décevantes, mieux vaut les manger.
Les orties
Si vous ne les mangez pas en soupe ou ne les utilisez pas pour faire du purin ou du shampoing, elles teignent aussi, je n’ai pas encore l’occasion d’essayer, une fois sèches ou cuites, elles ne piquent plus… Michel Garcia en parle dans un de ses livres.
A Gleterrens encore, je les ai testé et pour la teinture et pour les fibres.
Les rumex
Très mal vue par les agriculteurs, cette plante bioindicatrice est très intéressante, car elle contient beaucoup de tanins clairs, ce qui permet de l’utiliser comme mordant naturel en combinaison avec d’autres plantes. L’idéal est d’utiliser les racines, mais celles-ci peuvent être difficiles à arracher, dans ce cas le reste de la plante peut être utilisé.
Le quintal
C’est un parasite qui attaque de nombreuses espèces d’arbres au Chili et selon la plante hôte, le résultat va du beige au marron roux très lumineux, c’est une teinture que j’apprécie beaucoup.
…et j’en oublie beaucoup de ces plantes méconnues… évitons tout de même les plantes toxiques comme le datura! d’autant plus qu’elles ont aussi tendance à concentrer les métaux lourds et les pesticides qu’elles adorent.
Votre voisin taille ses haies ? encore des déchets utiles
A Iquique, en plein centre ville, au coeur du désert, un voisin a taillé son Bougainvillier un peu trop encombrant. Il avait de jolies fleurs roses fuchsia… c’était pour moi une vraie aubaine. Il ne faut pas avoir honte, j’avais là une matière première de choix, j’en ai ramassé deux gros sacs que j’ai partagés avec une amie, Jeannette Baeza, qui faisait des colliers avec des fleurs séchées.
A Santa Fe, en Argentine, ville pleine de verdure, avec mon amie Lucrecia, nous avons récupéré pour les deux ateliers de nombreuses plantes que les voisins avaient taillées…
Les rosiers, notamment, les feuilles donnent des résultats très intéressants en ecoprint, je crois que c’était l’une des plantes préférées de mon ami Hilaire à Antsirabé (Madagascar).
Les troënes, le chèvre-feuille, buddleia, le lierre, l’hortensia et de nombreuses autres plantes grimpantes ou utilisées pour les haies, peuvent teindre (attentions certaines peuvent toxiques).
Vive les feuilles mortes
Certains les jettent, c’est dommages car nos sols en on besoin pour se régénérer et se protéger. Mais on peut aussi teindre avec, elles contiennent souvent beaucoup de tanins et des flavonoïdes… en bref, des marrons, des jaunes, des verts bronze et olive, des gris…
Fleurs fanées
A Iquique, j’ai essayé les fleurs fanées d’hibiscus rouge, j’ai eu la grande surprise d’obtenir un joli vert clair quand j’ai ajouté l’alun.
A Santa Fe, lors de l’atelier à La Redonda, nous avons essayé les jolies fleurs mauves de jacaranda tombées au sol, le résultat a été un joli brun roux.
On peut aussi profiter des déchets des fleuristes, une plante n’a pas besoin d’être présentable pour teindre, il y a beaucoup de feuillages très intéressants pour les ecoprint que le fleuriste du quartier doit jeter, pourquoi ne pas les lui demander?
Les écorces et racines
Je ne vous conseille pas d’arracher des écorces et des racines sur des plantes vivantes, car cela peut les mettre en danger.
Mais on peut profiter des bois de taille des arbres fruitiers, j’ai, par exemple, essayé l’abricotier, quand je vivais à longotoma, cela m’a donné un beige rose pâle intéressant, les feuilles m’on donné du vert.
On peut aussi récupérer les écorces sur les bûches de bois de chauffage, c’est là que se concentrent les tanins. C’est ainsi que j’ai teint avec des grosses écorces d’eucalyptus.
Sciure de bois
J’ai testé la sciure de mélèze que je m’étais procurée auprès d’un artisan en bois, cela m’a donné une jolie couleur cuivrée.
Je n’ai pas encore essayé le BRF (bois raméal fragmenté) qui est très utilisé en permaculture, je suis curieuse de voir le résultat.
Noyaux et épluchures d’avocats
Pour les amateurs de thé et de maté, gardez vos déchets
Ces déchets-là aussi fonctionnent…
Le thé
C’est une grande source de tanins, il peut teindre presque tout, très solidement (s’éclaircit avec du jus de citron), en beige. Si on en consomme beaucoup, cela peut valoir la peine de garder les restes pour teindre…
Le maté
A Santa Fe, en Argentine, tout le monde boit du maté à longueur de journée, nous avons donc récupéré les déchets d’une seule journée, cela nous a suffit, car la casserole était petite, elle était elle-aussi de récupération…
Le café
Je n’ai pas encore essayé, car au Chili, on n’a pas de culture du café, on boit du café en poudre qui n’a plus rien de naturel, je ne peux donc pas récupérer des quantités suffisantes de marc de café, d’autant plus que le café est grillé durant la torréfaction, ce qui doit éliminer des composants de la graine.
Mais, le caféïer est une rubiacée, donc de la même famille que la garance. A Madagascar et en Equateur, j’ai vu l’arbre, mais je n’ai pas eu l’occasion d’essayer.
Le cacao
Je n’ai pas essayé, il me semble qu’il a plus d’affinité pour les graisses que pour l’eau, ce qui complique les choses en teinture textile, si l’on doit pouvoir laver… À la suite d’un cours que j’ai donné à Santa Fe, Argentine, des animatrices d’un centre culturel l’ont essayé. Je ne sais pas quel a été le résultat.
Déchets modificateurs
Urine
L’urine a été employé comme mordant ou modificateur depuis les temps les plus anciens, elle apparaît dans de nombreuses recettes de teintures, on récollectait de préférence l’urine des garçons avant leur puberté, il y a une modification chimique que les anciens teinturiers avaient sans doute découverte.
Sans remonter au moyen-âge, une amie originaire de l’Ile Maillen, près de Puerto Montt, m’a raconté que quand sa mère teignait, elle récupérait l’urine de ses 9 enfants.
A titre d’expérience, pour les fiches de modificateurs à Pica et à Santa Fe, nous avons testé l’urine.
J’allais oublier de mentionner la fameuse cuve d’indigo à l’urine. Je ne l’ai pas testée. Le Chili est un pays très hygiéniste, c’est peut-être pour cela que l’on a perdu pratiquement toutes les connaissances concernant l’indigo et on le redécouvre maintenant gràce à la mode du shibori. Quand Charles Darwin est passé par Chiloe vers 1832, si je me rappelle bien, il dit qu’il a vu les Indigènes échanger de l’indigo… Un curé allemand qui avait appris le mapundungu, langue des Mapuches et était passionné de botanique, mentionne une plante qu’il pense avoir été source de bleu, connue seulement dans certaines communautés, mais sans en être vraiment sûr.
Cendres
La lessive de cendre est très alcaline, elle était traditionnellement utilisé pour laver la laine et les vêtements. Celestina Stramigioli cite des recettes traditionnelles en Argentine où les femmes sortaient la laine du bain de teinture et l’imprégnait de cendres avant de la replonger dans la teinture.
Après les avoir utilisés en teinture, ces déchets peut partir au compost si vous avez un jardin.
Conclusion
Les déchets les plus divers peuvent servir à teindre, pourquoi se priver, d’autant qu’il faut beaucoup de matières tinctoriales pour teindre peu de fibres. Autant profiter des ressources gratuites qui peuvent être abondantes et à portée de main, les résultats peuvent être surprenants.