Heureuse de travailler la laine

Je suis heureuse de travailler la laine

Je suis très heureuse de travailler et de manipuler la laine, c’est la fibre que je peux travailler depuis la source au produit fini, il ne me manque que d’élever les animaux à tondre… J’espère que cela viendra (j’ai déjà fait un essai à Mamiña, avec des lapins angora)… J’aimerais aussi beaucoup essayer la sériciculture (élevage de vers à soie)…

Très heureuse, entrain de tondre un alpaga, à Concón, Bébé alpaga très curieux
Très heureuse, entrain de tondre un alpaga, à Concón, Bébé alpaga très curieux

La laine est la matière que j’ai en très grande quantité à ma disposition, ici à Puerto Montt, chez mon ami Angel, mais je m’intéresse aussi à toutes les autres fibres, surtout naturelles, bien que certaines soit rares et coûteuses ici (soie, lin, chanvre…).

Petite sélection de laines
Petite sélection de laines

A Madagascar, j’ai eu l’occasion de faire des essais avec la soie, le sisal, les fibres de bananier et le raphia.

Démostration de teinture à la cochenille sur différents types de fibres
Démostration de teinture à la cochenille sur différents types de fibres

C’est d’ailleurs, cet intérêt pour la diversité qui me pousse à me préparer pour un tour du monde textile et tinctorial. Je veux bien sûr retourner dans les endroits où j’ai eu des expériences de teintures intéressantes, mais il y a aussi beaucoup à apprendre en chemin

Si vous souhaitez organiser, là où vous vivez, une étape de formation et d’échanges techniques, n’hésitez pas à me contacter pour nous organiser.

Dans cet article, vous allez en apprendre plus sur moi.

Heureuse de filer

Débuts à La Ligua

J’ai appris à filer la laine il y a environ 10 ans, quand je vivais à La Ligua, qui est supposée être la capitale textile au Chili, c’était sans doute le cas il y a trente ans, où l’on entendait le bruit des machines à tricoter et des métiers à tisser, partout dans la ville.

Maintenant, la production a beaucoup diminué et est essentiellement à base de fibres syntétiques. Il y a un peu plus de dix ans, quand je vivais là-bas, j’ai tout de même trouvé une artisane qui a eu la gentillesse de m’enseigner à filer, il s’agit de Paulina de Origen Chile, je l’en remercie encore aujourd’hui,

Avoir appris à filer m’a beaucoup apporté et j’en suis heureuse. Cela n’est pas difficile, mais il faut de la pratique et c’est long, très lent. Au fuseau, mètre par mètre, au rouet électrique, c’est plus rapide, mais la qualité n’est plus la même. L’intérêt est que cela me permet d’obtenir un fil personnel qui ne peut pas se confondre avec un fil industriel. D’ailleurs, chaque personne qui file, file à sa façon, les femmes qui filent et vendent leur laine, la reconnaisse, même teinte parmi toutes les laines filées par leurs collègues.

Laines filées par différentes mains
Laines filées par différentes mains

Maintenant

Je trouve merveilleux de pouvoir partir d’une matière brute, directement de la tonte, d’en faire un fil, éventuellement de le retordre avec un autre, de pouvoir  mélanger cette matière brute avec une autre (de la soie, par exemple) ou avec une ou plusieurs autres couleurs, de tester les différents types de torsion, différentes textures… Les variantes sont infinies…

Laine de mouton en toison brute
Laine de mouton en toison brute

Filer permet d’occuper ses mains quand il fait froid, de ne pas rester à ne rien faire dans les temps d’attente, il m’arrive d’emmener de la laine et un fuseau quand je sors faire des démarches, d’ailleurs, je file aussi en marchant…

Filer comme culture

Je pense que l’on devrait enseigner aux enfants à filer, non seulement pour développer motricité fine et pour faire suivre des traditions qui risquent de se perdre, mais aussi parce que la filature au fuseau réunit un certain nombre de lois physiques et permet de les expliquer simplement (résistance, inertie, forces centrifuge et centripète…).

Filer pour la qualité

Filer moi-même ma laine me permet d’obtenir un résultat différent et donc une pièce unique non reproductible à l’identique, comme on le fait à La Ligua où tous se copient avec les mêmes matériaux de base (fils synthétiques, gammes de couleurs limitées, même si les hangars des marchands de “laine” sont impressionnants).

Sans le savoir, je suis rentrée dans le mouvement “slow“…

De plus, si je veux pouvoir être exigeante sur la qualité de laine que l’on me vend, je dois connaître tous les processus pour l’obtenir, les femmes qui me vendent leur laine savent que je file aussi et beaucoup ont amélioré la qualité de leur laine depuis la date où je suis arrivée à Puerto Montt.

Filer, c’est un peu méditer

Quand on file, on entre dans un autre monde, au fil des pensées qui vont et viennent, comme on analyse le fil qui se construit, petit à petit, on commence à voir les choses sous différents angles, à se poser des questions, à imaginer des expériences… Tisser et tricoter, avec leurs aspects mathématiques, permettent de poursuivre ces réflexions. Ces pratiques me font beaucoup de bien, et je ne voudrais pas être la seule à en bénéficier.

Heureuse de teindre

En même temps que j’apprenais à filer, je découvrais les teintures naturelles grâce à un livre de Dominique Cardon.

Livre de Dominique Cardon qui m'a donné les bases de ma nouvelle carrière
Livre de Dominique Cardon qui m’a donné les bases de ma nouvelle carrière

 La teinture est pour moi un vrai plaisir, la couleur modifie complètement la texture et la qualité de la laine, généralement en bien, parfois en mal, et ce si possible pour longtemps.

Quel plaisir que d’épuiser un bain (de cochenille, par exemple) et d’obtenir ainsi une série de couleurs en dégradé (certains bains semblent interminables), ou d’obtenir des laines multicolores, soit en reteignant, soit en jouant avec les mordants.

Tous ces roses saumon proviennent d'un seule et même bain de garance et cochenille qui n'en finit pas de s'épuiser, de ce bain sont aussi sortis quelques kilos de ruban à feutrer et de laine filée industriellement
Tous ces roses saumon proviennent d’un seule et même bain de garance et cochenille qui n’en finit pas de s’épuiser, de ce bain sont aussi sortis quelques kilos de ruban à feutrer et de laine filée industriellement

C’est aussi pour moi très agréable d’enseigner et de partager mes techniques.

Comment ne pas s’enthousiasmer quand on peut faire jaillir un jaune éclatant d’une simple “mauvaise herbe” comme la “sorona” ou “brea”… ou d’un déchet… On ne regarde plus son environnement de la même manière après ces simples expériences. Après, on voit des teintures partout… dans la cuisine, dans la rue, dans les poubelles… Il suffit d’essayer.

Jaune de sorona, plante détestée par tous ceux qui cultivent dans le nord du Chili - teinture lors du cours à Pica
Jaune de sorona, plante détestée par tous ceux qui cultivent dans le nord du Chili – teinture lors du cours à Pica

Certaines teintures peuvent être faites avec des enfants, il s’en émerveilleront.

Les enfants de Mamiña teignent du papier au choux rouge
Les enfants de Mamiña teignent du papier au choux rouge

Les matières tinctoriales sont très nombreuses et les techniques aussi. Il y a toujours de nouvelles expériences à faire, des plantes à tester, des essais de fermentation, d’ecoprint, de shibori, d’ikat…

A chaque teinture, j’apprends quelque chose, c’est aussi important

Heureuse de tisser

Après avoir obtenu une très ample gamme de couleurs naturelles, j’éprouve beaucoup de plaisir à les unir, les mélanger… en les tissant sur toute sorte de métiers, même en absence de métier véritable

Métier à tisser de fortune, à Concón
Métier à tisser de fortune, à Concón

Heureuse de tricoter

Non seulement je tisse, mais je tricote depuis l’enfance… le crochet me permet toujours d’unir les pièces tissées (je n’aime pas coudre, je couds donc au crochet).

J’ai beaucoup crocheté à différentes périodes de ma vie. Et, maintenant, je vis du travail de la laine, sous toutes ses formes.

Mon stand. lors de l'exposition à l'Alliance Française `à Antananarivo, MMadagascar, lors de l'IFPECO en mai 2017
Mon stand. lors de l’exposition à l’Alliance Française `à Antananarivo, MMadagascar, lors de l’IFPECO en mai 2017

Le crochet donne toutes les possibiltés: travaux plats, mais aussi en volume… qui peuvent s’aggrandir dans tous les sens, qui va de l’utile au simplement estéthique.

Chaque tissage est une expérience différente, il faut en tirer profit…

Heureuse de feutrer

Le feutre est une autre façon d’utiliser la laine avant sa filature. J’ai testé les deux techniques, humide avec l’eau et le savon et sèche avec les aiguilles.

Quelle surprise que de voir cette laine sans forme se compacter et prendre forme, passer d’un paquet de fibres de laines désordonné à une toile non tissée, mais résistante ou une pièce en volume et solide. unifiée, parfois souple et légère et presque transparent ou raide et compacte, en passant par tous les intermédiaires.

Là aussi, la couleur intervient, elles peuvent se fondre ou s’opposer.

On peut y inclure des fibres différentes, du tissu. des pièces de crochet, on peut le broder, l’imprimer, le feutre est donc une matière très versatile.

Echarpe en feutre brodée, teinte aux feuilles de noyers
Echarpe en feutre brodée, teinte aux feuilles de noyers

J’espèrais pouvoir recycler ainsi des laines courtes que les femmes qui filent ne veulent pas utiliser, mais cela n’est pas si facil, le nettoyage de ces laines est très long et je n’ai pas réussi à obtenir des résultats très satisfaisants. Et pourtant, on doit pouvoir partir de la laine brute.

Heureuse d’enseigner

Enseigner et partager mes connaissances et expériences est très bénéfique.

Quand j’avais ma petite imprimerie informatique, quand je suis arrivée au Chili, à Viña del Mar pour y rester en 1999, je faisais toute sorte d’impressions (cartes de visite, souvenirs, parchemins…) avec mon client à côté et je m’efforçais de me plier à ses désirs…

Maintenant, il en est de même avec les formations qui doivent s’adapter à chaque cas… Par exemple, pour le cours de teintures naturelles à La Redonda, Santa Fe, Argentine, ils ont voulu travailler surtout avec le coton, parce qu’il faisait très chaud déjà, et que la laine n’est pas courante dans cette région, je m’y suis adapté, et cela a été passionnant pour moi, l’expérience a été si intéressante que j’ai choisi d’en parler lors de ma présentation à l’IFPECO de Madagascar en mai 2017, plutôt que de parler des quatre dernières années à Puerto Montt, où je vis au milieu de la laine.

Technique à l'indigo de réserve à l'argile de Michel Garcia complétée à l'argile de couleur par des stagiaires céramistes
Technique à l’indigo de réserve à l’argile de Michel Garcia complétée à l’argile de couleur par des stagiaires céramistes

Je souhaite donc multiplier à l’infini ces expériences…

Heureuse de toutes les rencontres

Je suis heureuse de toutes les rencontres faites lors de mes cheminements. Je pourrais écrire tout un livre sur les personnages de Mamiña, ce village vit à la fois décalé du monde moderne et est en même temps trop proche de la modernité qui menace de l’engloutir…

A chaque étape, j’ai connu des gens qui me donne envie de revenir…

Parfois, heureuse de vendre

J’ai parfois le bonheur de vendre… Ce n’est pas aussi facile que l’on pourrait le croire, le temps n’est malheureusement pas valorisé, ni l’expérience… comme si les choses se fabriquaient toutes seules…

C’est tout de même agréable de voir ses créations appréciées… Cela a été le cas lors de l’IFND à Taiwan où j’ai vendu plus de la moitié des deux valises de tricots et tissages en laine que j’avais amenées. J’ai été vraiment très agréablement surprise, vu qu’il fait très chaud à Taiwan.

Pourquoi suis-je aussi heureuse?

Une autre des composantes de mon bonheur sont les voyages. Ma passion m’a permis de voyager, et je me prépare pour un long voyage d’investigations et d’échanges sur ces techniques…

La lecture, technique, mais aussi diverse est une partie importante de ma vie, malheureusement la culture a un coût élevé ici.

Je suis aussi heureuse d’être apicultrice

Cela n’a peut-être rien à voir avec le sujet, mais ce sont les abeilles qui m’ont introduite dans le monde de l’écologie, j’y étais déjà sensible, mais en théorie, pas dans la pratique. J’avais encore quelques rûches quand j’ai commencé à teindre avec les plantes…

Un des trois essaims d'abeilles que j'ai récupéré à Longotoma
Un des trois essaims d’abeilles que j’ai récupéré à Longotoma

En découvrant les abeilles, j’ai aussi compris beaucoup de relations entre la chimie et beaucoup de choses, entre autre la teinture naturelle…

J’ai aussi découvert une apicultrice, mon amie Lucia à Rancagua… avec elle nous avons aussi fait des expériences de teintures naturelles…

Comment suis-je heureuse?

Les découvertes quotidiennes pratiques et théoriques me rendent heureuse et me poussent à en faire toujours plus. Et le plus beau de tout cela, c’est que je le fais d’habitude avec peu de moyens… Parfois moins est mieux!

Et si je partageais ce plaisir?

C’est ce que j’essaie de faire avec ce site et avec les formations. Et je continue à vous proposer d’organiser de nouvelles expériences… pour innover en retournant aux traditions…

Conclusion

Ma vie consiste donc, maintenant, à manipuler la laine ou d’autres fibre par tous les moyens possibles pour obtenir des objets de toutes sortes…

Je m’intéresse aussi à tout ce qui est tresses, cordons, mais aussi dentelles, frivolité… et autres techniques anciennes, voire “primitive” qui sont parfois fort compliquées et très créatives…

J’aime mélanger les techniques, elles se complètent… et m’enseignent des détails qui peuvent être importants.

Cette vie me permet de toujours apprendre, ce qui allie l’utile à l’agréable et j’en suis heureuse…

Tisser avec le métier Maria

/// Tisser avec le métier María ///
Article modifié le 6 mai 2023
Retour en Europe le 4 mai 2023, jusqu’au 15 novembre 2023
Orga
nisons donc des ateliers! C’est facile
Prochain cours “a Pica et Codao – Chili en Novembre 2023 – Pica et Codao
+33 7 69 905 352 ou +56 9 764 449 78 (whatsapp, telegram et signal) – publicobre2000@yahoo.es
Plusieurs nouveaux articles sont en cours de rédaction et seront bientôt publiés.

Comment tisser avec le métier María

Dans un article précédent, j’ai expliqué les qualités de ce métier à tisser intermédiaire entre les cadres à clous, les métiers anciens, traditionnels, à pieux, mapuche… et les métiers dits “professionnels” à pédales.

Maintenant, je vais vous montrer comment le tisser…

Petite pièce tissée, avec des restes de laines teintes naturellement
Petite pièce tissée, avec des restes de laines teintes naturellement

Préparer la chaîne

Pour ce métier à tisser, la préparation de la chaîne est une étape de première importance, car les erreurs gêneront durant toute la durée du tissage. Donc pour bien tisser, il faut faire très attention à l’installation de la chaîne.

D’autre part, il faut aussi essayer d’économiser les matières premières, les laines de chaîne doivent être de la meilleure qualité possible, elle doivent résister aux mouvement du peigne (qui s’il est mal pensé, peut user et couper les fils de chaîne). Donc, il faut au moins une fibre à deux fils, pour la solidité. Cela a un coût, surtout si on travaille avec des fibres filées artisanalement.

C’est la raison pour laquelle je prépare des chaînes les plus longues possibles. Je coupe les pièces une fois tissées, et renoue les futures franges pour recommencer une nouvelle pièce.

Mes premières chaînes longues devaient mesurer 5-6 mètres, dès que j’ai commencé à travailler avec ce métier à tisser, en revenant de Santa Fe (Argentine), à Mamiña.

L’idéal est de monter la chaîne à l’extérieur, mais en évitant les jours de vent, celui-ci peut emmêler les fils, et il a tendance à allonger certains fils plus que d’autres.

Montage de chaîne sur métier à tisser María à Mamiña
Montage de chaîne sur métier à tisser María à Mamiña
Montage d'une chaîne sur métier à tisser María, lors du cours que j'ai donné à Pica
Montage d’une chaîne sur métier à tisser María, lors du cours que j’ai donné à Pica

A Puerto Montt, j’ai de la place je monte des chaînes de plus de 10 mètres, récemment, je suis allée donner un cours à Andacollo, nous avons monté une chaîne de 18 mètres de long.

J’ai donc moins de pertes que si je monte 6 ou 7 chaînes de 2,50 m (par exemple, dans le cas des jetées de lit), ou l’on perd toutes les attaches des deux côtés. Il y a des gens qui coupent les fils de chaîne un par un, ils ont beaucoup de perte, on ne tend pas toujours pareil les fils, à la sortie du métier le tissage se rétrécie dans les deux sens, il faut donc en tenir compte dans les calculs…

Je préfère monter de longues chaîne, mesurer mes pièces au fur et à mesure du tissage, et couper quand je veux, je renoue la chaîne et continue jusqu’à épuisement de la chaîne, ainsi je l’utilise à fonds.

Je vais donc vous montrer le montage d’une chaîne de 10 m, étape par étape, sur un métier d’1.20 m de large au moyen de photo.

Le métier doit être bien fixé à une table inamovible. La chaîne va s’accrocher à une barre, ou à un pieux.

Les fils passent en double dans les fentes du peigne.

Les fils passent double dans les fentes et vont s'attacher sur l'ensouple arrière
Les fils passent double dans les fentes et vont s’attacher sur l’ensouple arrière

Enrouler la chaîne sur le métier à tisser

Avant, je coupais la chaîne et en faisait une ou plusieurs chaînettes géantes avec toute la chaîne, o la chaîne divisée en trois ou quatre parties.

Premiers essais de montage de chaîne
Premiers essais de montage de chaîne

Maintenant, une fois la chaîne tendue, je la coupe, et la noue en la lissant bien à un objet (actuellement une valise, j’ai vu une video sur internet où ils utilisaient une bouteille de 5 l d’eau). Avec ce système, je peux monter ma chaîne toute seule.

Attache de la chaîne sur la valise
Attache de la chaîne sur la valise
On tire la valise en enroulant la chaîne sur l'ensouple
On tire la valise en enroulant la chaîne sur l’ensouple

J’enroule la chaîne sur l’ensouple en tirant sur la valise, qui se rapproche petit à petit du métier sans s’emmêler.

Quand la valise est assez proche du métier, on peut détacher la chaîne et on continue à enrouler en lissant bien la chaîne
Quand la valise est assez proche du métier, on peut détacher la chaîne et on continue à enrouler en lissant bien la chaîne

Quand il ne reste presque plus de chaîne à enrouler, on dénoue la valise, on ne garde que le nécessaire pour nouer la chaîne sur l’autre ensouple ou s’enroule la toile.

On coupe les fils de chaîne pour les égaliser avant de les nouer. Je récupère ces déchets pour faire des franges…

On égalise les fils de chaîne avant de les sèparer entre fentes et trous et de les nouer
On égalise les fils de chaîne avant de les sèparer entre fentes et trous et de les nouer

Nous passons à l’étape suivante.

Séparer les fils pairs et impairs

A ce niveau, on peut désolidarisé le métier de la table. On va retirer un fil de chaque fente du peigne pour le passer dans le trou à côté. On le fait fil par fil.

On sépare les fils de chaîne entre les fentes et les trous
On sépare les fils de chaîne entre les fentes et les trous

Attacher les fils  de chaîne sur le métier à tisser

Une fois cette étape finie, on va attacher les fils de chaînes à l’ensouple sur laquelle va s’enrouler la toile tissée.

On va prendre ces fils par petits paquets (je prends habituellement 4 et 4) et je les noue sur la latte de bois qui est attachée à l’ensouple. Je les noue de façon à pouvoir les dénouer à la fin du tissage pour les transformer en franges.

Tous les fils de chaînes sont attachés
Tous les fils de chaînes sont attachés

Commencer à tisser

Et maintenant, on peut commencer à tisser.

Je laisse 3 trois fois la largeur de la chaîne de fil de trame sans le tisser.

Je tisse les premières trames (environ 10), en général, avec une laine fine, semblable à la chaîne.

On prépare la navette
On prépare la navette

On passe la navette dans l’ouverture des fils, on pousse le fil de trame vers soi, à l’aide du peigne, on inverse la position du peigne et on repasse la navette dans l’autre sens.

Passage de la navette, peigne en position basse
Passage de la navette, peigne en position basse
Passage de la navette, peigne en position haute
Passage de la navette, peigne en position haute

Une fois que l’on a une dizaine de trames tissées, on fait le point péruvien.

Premières trames passées
Premières trames passées

Je prends alors le fil que j’avais laisser en dehors du tissage. je l’enfile sur aiguille à canevas. Je vais faire le point péruvien pour bloquer la chaîne et la trame. Cela évite de faire des noeuds avec les franges.

On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes
On prend 3 trames et on décale de 2 chaînes

En fin de compte, c’est un point de broderie. Je vais prendre deux fils de chaîne et trois de trame, j’obtiens un point oblique, qui bloque le tissage.

Point péruvien appliqué aussi bien à l'horizontal qu'à la vertical
Point péruvien appliqué aussi bien à l’horizontal qu’à la vertical
Je fais le point péruvien à la verticale, juste avant de rembobiner la toile
Je fais le point péruvien à la verticale, juste avant de rembobiner la toile
Ce chemin de table est parcouru sur toute s longueur par des points péruviens, il ne lui manque que les finitions
Ce chemin de table est parcouru sur toute s longueur par des points péruviens, il ne lui manque que les finitions

Ce point peut aussi s’utiliser à la verticale ou au milieu du tissage comme décoration. J’applique ce même point à la fin du tissage.

Point péruvien terminé, pièce prête à être coupée
Point péruvien terminé, pièce prête à être coupée

Mesurer les pièces à tisser

Pour mesurer les pièces, quand je vivais à La Ligua, on m’a expliqué comment faire, une petite astuce, il suffit d’un mettre ruban, ou mieux deux collés l’un à la suite de l’autre.

On le bloque quand on commence à enrouler la pièce, juste au début de la pièce. C’est bien pratique, mais pas tout à fait précis, car on tend la toile au fur et à mesure que l’on l’enroule et tisse, quand on coupe la pièce, celle-ci se rétracte, il faut en tenir compte. Cela dépend de la tension de votre chaîne quand vous travaillez.

Mètre de couturier coincé au début de la toile, il s'enroule au fur et à mesure que l'on tisse
Mètre de couturier coincé au début de la toile, il s’enroule au fur et à mesure que l’on tisse

Finir une pièce

Pour finir la pièce, je fais de nouveau un ligne de point péruvien en brodant 3 trames et déplacement sur le côté de 2 chaînes.

On fnit la pièce par le point péruvien
On fnit la pièce par le point péruvien
On termine le point péruvien en cachant le fil avant de le couper
On termine le point péruvien en cachant le fil avant de le couper

J’enroule un peu la toile pour les franges et je coupe.

On enroule la chaîne
On enroule la chaîne
On coupe la pièce en crèant des franges
On coupe la pièce en crèant des franges

Il suffit de dérouler l’ensouple et de dénouer les franges du début.

Pièce déroulée
Pièce déroulée
On dénoue les franges
On dénoue les franges
Franges dénouées, elles devront être égalisées
Franges dénouées, elles devront être égalisées

Les franges de la prochaine pièces seront certainement plus régulières.

Je ne suis pas obligée de couper à chaque fois, je peux laisser un vide et recommencer à tisser en bloquant bien avec le point péruvien.

On renoue les fils de chaîne pour commenceer une nouvelle pièce
On renoue les fils de chaîne pour commenceer une nouvelle pièce
Je termine la pièce en crochetant les bords
Je termine la pièce en crochetant les bords
Pièce terminée -chemin de table 2,30 x 0,33 m
Pièce terminée -chemin de table 2,30 x 0,33 m

Finir la chaîne

S’il reste un peu de chaîne, on peut le terminer en faisant de petites pièces, j’ai souvent fait des ceintures, ou de petites bandes que j’ai terminé en petites pochettes.

Fin de la chaîne, je fais le point péruvien de fin de pièce et je suis prête à couper
Fin de la chaîne, je fais le point péruvien de fin de pièce et je suis prête à couper
Vue arrière du métier
Vue arrière du métier
J'ai commencé à couper la quatrième et dernière pièce de cette chaîne
J’ai commencé à couper la quatrième et dernière pièce de cette chaîne
Quatrième et dernière pièce de cette chaîne juste sortie du métier, il lui manque les finitions sur les côtés, comme elle est presque blanche et lisse, je pense la teindre en ecoprint
Quatrième et dernière pièce de cette chaîne juste sortie du métier, il lui manque les finitions sur les côtés, comme elle est presque blanche et lisse, je pense la teindre en ecoprint

Le métier que j’utilise actuellement me permet d’utiliser à fonds mes chaînes, avant avec l’ancien métier, je le retournais et le tissais à l’envers.

Métier tissé des deux côtés
Métier tissé des deux côtés

Conclusion

Et nous sommes prêts pour commencer un nouveau tissage.

Nouvelle pièce commencée
Nouvelle pièce commencée
Nouvelle pièce en fin de journée
Nouvelle pièce en fin de journée

Les possibilités au niveau des points sont infinies, rayures, torsions de chaînes, broderie, trames supplémentaires… Puis, il faut jouer avec les différentes grosseurs et textures de fibres, les couleurs, si possible naturelles

Petit échantillons de laines teintes naturelles attendant de rencontrer un métier à tisser
Petit échantillons de laines teintes naturelles attendant de rencontrer un métier à tisser

Je prévois un autre article présentant des points particuliers et éclairant certains détails, j’attends vos questions…

Nouveaux cours

Avec Lucia, nous avons décidé d’organiser un nouveau cours de teintures naturelles en novembre 2023 à Codao, comuna de Peumo.

Auparavant, il y en aura un à Pica, un peu la suite de celui de 2010

J’attends avec impatience vos remarques sur mon courrier électronique ou mes whatsapp/signal/telegram.

Je reçois trop de courriers orduriers et de propositions malhonnêtes en laissant la possibilité d’envoyer des commentaires directement.

Francoise Gabrielle Raffi

Mobile français Reglomobile, whatsapp, telegram et signal
+33 7 69 905 352
Mobile chilien Entel, whatsapp, telegram et signal
+56 9 764 449 78
Mobile chilien Movistar
+56 9 831 670 91 Ce numéro a été attribué à une autre personne pendant mon absence du Chili, de plus cette compagnie a décidé de changer mon identité!!!
e-mail:
publicobre2000@yahoo.es

facebook: francoise gabrielle raffi
linked’in: francoise gabrielle raffi
twitter: @FrancoiseRaffi

Beiges, brun, marron, café…

Les beiges, c’est courant

Après les jaunes, les beiges sont très faciles à obtenir, le plus souvent sans mordant. Cela est très intéressant. Eviter d’utiliser de l’aluminium (pierre d’alun, sulfate d’aluminium), c’est une économie, c’est écologique, mais aussi un supplément de santé…

Les beiges sont recherchés

Ce sont des couleurs sobres. sans prétention, qui se combinent bien avec les autres. Je viens d’aller donner un cours à une dame qui voulait teindre de la laine pour la vendre à ses amies de la haute société, les couleurs qui l’intéressaient le plus étaient en particulier des beiges et non les rouges de cochenille. J’étais un peu surprise, mais cela était très intéressant.

Ce sont aussi des couleurs peu salissantes, donc pratiques à porter.

Il y a une très grande variété de beiges, bruns, marrons, café… ils peuvent être teinté de rosé, de vert, de jaune…

Michel Pastoureau en parle peu, mais c’étaient des couleurs paysannes, faciles à obtenir, je pense en particulier aux tableaux des frères Lenain…

Comment obtient-on des beiges

Le arbres sont une grande source de beiges, bruns, café… une grande gamme de couleurs.

Ecorces, graines et feuilles mortes (à l’automne), de nombreux déchets des arbres nous donnent ces tons, dans une gamme très amples…

Arbres sources de beiges, marrons, café...
Arbres sources de beiges, marrons, café…

Les beiges dans les fibres sans teindre

Avant de les teindre, de nombreuses fibres sont déjà colorées, en gris, beiges, marrons, et même éventuellement noires… parfois aussi, vertes, ou jaunes…

Teindre des fibres de couleurs permet d’obtenir des teintes plus foncées avec moins de matières tinctoriales, les cultures précolombiennes l’avait compris et le faisait courrament.

Moutons

Pas de moutons jaunes ni verts, mais gris, beiges, marrons, café, brun très foncés et quelques fois noirs, cela existe encore. Dans le nord de l’Europe, la plupart des brebis étaient noires, comme en témoigne une vieille comptine anglaise.

Les brebis brunes, au Sud du Chili, ont une laine très bonne, longue et agréable à filer, cependant, elles sont entrain de disparaître car le Ministère de l’Agriculture pousse à l’élevage de moutons pour la viande, donc à laine courte, sans laine sur le ventre… La vente de la laine ne justifie plus l’élevage de brebis pour la laine…

Il nous reste donc des laines courtes, blanches, pas aussi fines, souvent récupéré dans les tanneries, après traitements à la chaux ou d’autres bases qui maltraitent la laine et la rende rèche… et à l’opposé un peu de mérinos dans la zone de Punta Arenas, mais qui s’en va directement à l’exportation.

Alpagas et autres camélidés

Les alpagas et les llamas, qui sont les camélidés domestiqués ont des robes qui vont du blanc très blanc au noir très noir, en passant par tous les tons de beiges, de marrons, mais aussi de gris.

LLamas beiges et marrons à Mamiña
LLamas beiges et marrons à Mamiña

Les camélidés sauvages (guanacos et vigognes) sont général beige claire avec un peu de blanc pour les vigognes. Ces couleurs leur permettent de se camoufler dans les zones semi-désertiques où ils vivent. La laine de vigogne étant très appréciée pour sa finesse et sa douceur. Par extension, la couleur de la vigogne, sur les autres laines est très appréciée dans le nord de l’Argentine, comme en témoignent les femmes qui ont informées Celestina Stramigioli dans ses livres très intéressants sur les teintures naturelles dans la région de San Juan et de Santiago del Estero, en Argentine.

Vigognes, près d'Uyuni, Bolivie
Vigognes, près d’Uyuni, Bolivie

Je suis allée, il y a quelques années, à un Tinkuy de Tejedores, à Cusco, au Pérou, un grand professeur expliquait qu’il y avait un problème de blanchissement des troupeaux d’alpagas.

Lapins angora

Les lapins, angora ou pas ont des fourrures de couleurs très variées à l’instar des camélidés. Cependant, les blancs sont plus courants, parce qu’un lapin donne très peu de laine, et pour une production régulière on tente d’uniformiser les couleurs.

Lapin angora à Iquique
Lapin angora à Iquique

Chèvres angora

Je n’en suis pas spécialiste, il me semble que la variété de couleurs doit être semblable à celle des autres races de chèvres. Mais le blanchiment des troupeaux a certainement eu lieu.

Diapositive extraite d'une présentation sur un cours que j'ai donné sur l'ecoprint
Diapositive extraite d’une présentation sur un cours que j’ai donné sur l’ecoprint

Cotons anciens, lins, chanvre et autres fibres végétales

Les cotons anciens étaient bruns, roux, verts ou beiges, et ont été blanchis par sélection par les paysans au cours des siècles. C’est pourquoi, maintenant on est habitué à des cotons blancs, et bien blancs.

Plan de coton à Paipote, près de Copiapó, Chili
Plan de coton à Paipote, près de Copiapó, Chili

Les autres fibres naturelles ne sont pas naturellement blanches, le lin, le chanvre, le jute… doivent être blanchies chimiquement et cela a longtemps été un problème, jusqu’à la découverte de l’eau javel… l’eau oxygénée est même plus efficace et pose moins de problèmes.

Soie sauvage et domestique

La soie sauvage est naturellement beige, la soie domestique est généralement blanche, mais il existe des bombix qui donnent des cocons jaune (jusqu’au jaune d’or) et parfois verts.

Soie domestique blanche et soie sauvage beige
Soie domestique blanche et soie sauvage beige

En haut, soie sauvage filée, en bas, à gauche cocons de soie sauvage, à droite soie domestique naturellement colorés, provenant de Madagascar
En haut, soie sauvage filée, en bas, à gauche cocons de soie sauvage, à droite soie domestique naturellement colorés, provenant de Madagascar

Le beige comme fond

Tisser avec un fond beige ou gris, peut être intéressant, vu que la plupart des couleurs se combinent bien avec un tel fond. Autant en profiter.

Feutre brodé et surtissé, fond beige d'eucalyptus
Feutre brodé et surtissé, fond beige d’eucalyptus

Il peut être intéressant de teindre des toiles anciennes, nappes, draps, napperons avec du thé, par exemple, pour leur donner un air rétro.

Et, si l’on veut des tons plus foncés

Comme je l’expliquais au début de l’article, nous beaucoup avons à notre disposition beaucoup de plantes qui donnent des tons de beige.

Il existe différents types de tanins.

Tanins à beige

Fougères, grenades. thé, châtaignes, boldo, gale du chêne, peaux de grenades, rumex, et autres plantes à tanins peu colorants…

Tanins plus colorés

Mais souvent, il ne suffit pas d’augmenter la quantité de plantes à teindre, il faut chercher des plantes à tanins foncés (eucalyptus, acajou, noyer, chataigner, mélèze, pommes…).

Si l’on épuise les bains de ces plantes à tanins colorés, on obtient des beiges.

Quand les beiges virent au gris

Les beiges, proviennent de tanins ne sont pas insensibles aux modificateurs… et quand ils rentrent en contact avec du fer (soupe de clous – vinaigres et clous, sulfates de fer), ils virent au gris plus ou moins foncé.

C’est ainsi que l’on faisait des encres à écrire avec les écorces de grenades et du fer.

Conclusion

Il ne faut pas se priver de ces teintures sans mordant, ou qui peuvent même servir de mordant naturel, souvent à partir de déchets. Que de belles couleurs  et faciles à obtenir!

On ne doit donc pas être déçu quand on obtient un beige, on peut toujours reteindre.

Graines pour teindre

/// Graines pour teindre ///
Article modifié le 11 octobre 2022
Prochain retour au Chili le 11 novembre 2022, retour probable en Europe en mai 2023
Organisons donc des ateliers! C’est facile
+33 7 69 905 352 ou +56 9 764 449 78 (whatsapp, telegram et signal) – publicobre2000@yahoo.es
Plusieurs nouveaux articles sont en cours de rédaction et seront bientôt publiés.

Graines et fruits peuvent aussi teindre

Pourquoi ne pas travailler avec les graines et fruits?

La nature est généralement très généreuse en ce qui concerne les graines et les fruits, les plantes ne pouvant pas se déplacer elles-mêmes, les graines sont une admirable solution. Le vent, l’eau, les animaux et même les êtres humains les transportent et les resèment (voir Francis Hallé).

Vu que les graines sont le plus souvent en surnombre, on peut en profiter pour en réutiliser un peu pour teindre…

Quel est l’intérêt des graines

Les enveloppes des graines contiennent généralement beaucoup de tanins pour les protéger contre les animaux qui pourraient les manger.

Les glands, les marrons, les gousses de mimosa…

Je n’avais pas encore testé les glands, c’est plutôt rare au Chili, la plupart des chênes ont été remplacés par des eucalyptus et des pins… mais, par les livres (Dominique Cardon…), je sais qu’ils peuvent être utiles en teinture. Je viens de le faire cet été à Gletterens en Suisse. Un matin, jai ramassé les premiers glands tombés à la suite d’un bon coup de vent.

Les premiers glands de l'année vont bientôt commencer à tremper
Les premiers glands de l’année vont bientôt commencer à tremper. résultat un beige

J’ai testé les bogues de marrons d’Inde, et j’ai obtenu un beige.

Les gousses de mimosa, comme celle de tous les acacias sont bourrés de tanins et devraient être intéressantes à essayer, ces arbres en produisent vraiment beaucoup.

Graines d'espino (acacia) pas encore mûres
Graines d’espino (acacia) pas encore mûres
Mimosa en fleur à Longotoma
Mimosa en fleur à Longotoma

Je n’ai pas testé les réceptacles des graines d’eucalyptus, c’est beaucoup plus simple avec les feuilles et l’écorce.

Les pommes de pin, ainsi que les aiguilles et les écorces de ces arbres doivent contenir des tanins, mais je ne les ai pas essayés.

Les châtaignes, les pistaches, les amandes…

Vu que ces graines sont comestibles et très bonnes pour la santé, mieux vaut les manger et utiliser les déchets pour la teinture. Dans le cas des châtaignes, on peut aussi bien utiliser les bogues que les enveloppes dures que l’on ne consomme pas.

Les écorces des amandes m’ont donné une couleur rosée cuivrée qui m’a beaucoup plû.

Encore à Gletterens, des coques d'amandes vertes trempent en attendant la cuisson
Encore à Gletterens, des coques d’amandes vertes trempent en attendant la cuisson (casserole de droite), a côté de noix pas mûres et de noyaux d’avocat

En Equateur, j’ai testé l’écorce de noix de coco, le résultat était un peu décevant, mais je n’ai pas tenté de reteindre ensuite.

Des graines spéciales: les noix

Comme dans le cas des châtaignes, l’écorce dure des noix peut être utilisée. Mais la partie la plus intéressante est l’enveloppe qui est molle, d’abord verte puis marron foncé, c’est le brou de noix, bien connu en menuiserie.

L’idéal est de le laisser fermenter un maximum de temps, afin qu’il libère le plus possible de colorant. Cela donne de très jolis bruns très solides dont la réputation n’est plus à faire.

Marron au premier plan, teinture au brou de noix
Marron au premier plan, teinture au brou de noix

Les fruits non mûrs

Les fruits verts qui tombent des arbres après une tourmente ou des pluies trop violentes sont aussi bourrés de tanins, ils peuvent remplacer les mordançages classiques à l’alun.

Au Brésil, j’ai aussi découvert les fruits non mûrs de genipap. Ils servent notamment pour teindre des gâteaux ou des alcohols. On les utilise aussi pour des tatouages temporaires.

Ce fruit de genipap, à peine ouvert, commence à bleuir au contact de l'air
Ce fruit de genipap, à peine ouvert, commence à bleuir au contact de l’air

Et les noyaux

Les noyaux d’avocats servaient à marquer de manière indélibile les vêtements des enfants pour l’école, simplement avec une aiguille ou une épingle. N’étant pas très friande de cet excellent fruit, je n’ai pas encore eu l’occasion de l’essayer, ce que tester ce sont les feuilles qui sont intéressantes.

Noyaux d'avocats et noix tombées avant d'être mûres en train de tremper
Noyaux d’avocats et noix tombées avant d’être mûres en train de tremper

Quand, je vivais à Mamiña, j’ai récupéré un sac de noyaux de mangue dans un café qui offrait des jus naturels sur le marché d’Iquique. J’ai obtenu un jaune rosé très intéressant.

D’autres noyaux peuvent êtres utilisés, je pense aux jolis noyaux de néflier, de lucuma, ils sont si beaux, je n’en ai pas encore eu l’occasion.

Je serai curieuse de tester les noyaux d’olives, de pêches, d’abricots, de prunes, de cerises, chirimoya… malheureusement je suis trop mauvaise consommatrice de fruits pour pouvoir en réunir une quantité suffisante pour teindre, et je préfère les resemer.

Le maïs noir

A Iquique, on trouve un maïs noir, produit au Pérou. Je l’ai laissé tremper quelques jours dans de l’eau, puis je l’ai filtré, j’ai donc teint dans le jus violet foncé qui m’a donné un gris.

Le roucou

Le roucou est une graine utilisée comme épice dans les régions où cette plante pousse (en Equateur, elle très utilisée en cuisine, teint en rouge tous plats). En Amazone, il est utilisé comme peinture corporelle, certainement très bénéfique car doté d’un taux très élevé de vitamine A. C’est donc aussi un colorant alimentaire sans danger.

A Madagascar, il est aussi très utilisé en teinture, bien qu’il ne soit pas grand teint vu sa plus grande affinité pour les graisses.

Graines de roucou, lors de l'exposition d'Andrée Etheve au Centre Culturel Français, lors de l'IFPECO à Antananarivo en mai 2017
Graines de roucou, lors de l’exposition d’Andrée Etheve au Centre Culturel Français, lors de l’IFPECO à Antananarivo en mai 2017

Les baies

Un certain nombres de baies peuvent teindre, dans ce cas, ce n’est pas la graine, mais ce qui l’entoure et plus souvent la peau noire: sureau, mûres, maqui, mirtilles, cassis, raisins…

Malheureusement, ces teintures ne sont pas très fiables, varient avec le pH, et sont peu solides.

En outre, certaines sont toxiques: sureau yèble, parqui… mieux vaut les laisser aux oiseaux qui s’en nourrissent…

Les gales

Les gales sur les chênes, mais aussi sur beaucoup d’autres arbres, ne sont pas des graines, elles sont le résultat de la piqure d’un insecte pour pondre ses oeufs et de la réaction de l’arbre qui produit des tanins pour se protéger.

L’intérêt des gales, c’est qu’elles donnent des tanins très clairs qui n’influencent que très peu la couleur définitive tout en la fixant.

Gales du chêne
Gales du chêne

Eviter certaines graines

Je vous conseille pas les graines de parqui (parqui cestrum), j’en parle dans un autre article.

Quand on teint avec des fleurs qui ont de petites graines, il faut faire attention à ce que celles-ci ne viennent pas se coller dans la laine, je pense notamment aux bidens qui ont le don de s’accrocher partout, au Chili, on les appellent “amores secos” (amours sèches). Cette plante appelée benoite en français, donne un très joli jaune (utilisé par les Incas), je l’ai utilisée à Mamiña.

Bidens à Mamiña
Bidens à Mamiña

Les fruits murs de la plante hémiparasite quintal du molle, sont très collants, et le restent même bouillis.

Quintral en fleur
Quintal en fleur, donne de très jooli brun roux tr`es lumineux

Comment utiliser les graines

L’idéal est d’utiliser essentiellement les enveloppes, gousses… et semer ou consommer ce qui peut l’être, comme dans le cas des noix, des châtaignes…

L’idée est d’utiliser avant tout, les déchets, comme par exemple, le marc de café, les épluchures (pommes, poires, châtaignes…).

Et si, le résultat était un mordançage

Il y a quelques jours, j’avais des graines de potiron et je me suis dit “pourquoi ne pas teindre avec?“. Alors, j’ai essayé, le résultat a été très décevant.

Laine teinte aux graines de potiron
Laine teinte aux graines de potiron

Puis deux jours plus tard, je lis sur internet, sur un document ancien sur les teintures domestiques en Angleterre, mentionnait les graines de potiron comme mordançage.

Je viens de mettre à tremper cette laine pour quelques jours avec une laine blanche sans traitement dans un vieux bain de garance et de cochenille, pour l’épuiser. Il va falloir attendre le résultat.

Laine teinte aux graines de potiron trempant dans un vieux bain de cochenille et garance, attandant quelques jours avant de bouillir
Laine teinte aux graines de potiron trempant dans un vieux bain de cochenille et garance, attendant quelques jours avant de bouillir

Et si, on veut semer les graines

C’est encore mieux et je vous y encourage vivement.

Lors du cours que j’ai donné à Pica, nous avons teint avec le tara (ceasalpina), avec ses graines, mais on a utilisé seulement les gousses, une des femmes qui assistait au cours, a emmené les graines chez elle, elle les a semées, elle a eu un grand nombre de petits arbres!

Graines de tara `Mamiña
Graines de tara à `Mamiña
Séparation des graines des gousses de tara lors du cours à Pica
Séparation des graines des gousses de tara lors du cours à Pica

L’idéal est d’ailleurs le plus souvent, de ne pas utiliser les graines, mais plutôt les enveloppes, dans les graines, il y a beaucoup d’amidon et celui-ci peut être gênant.

En effet, quand je vivais à Longotoma, j’ai essayé de teindre avec des graines de sorgho (curaguilla, utilisées au Chili pour que les poules aient envie de pondre). Je les ai fait fermenter pendant au moins un mois, avec la laine dedans, puis j’ai fait chauffer, cela a teint, un marron rose cuivré intéressant, mais le problème c’est que la laine en est ressortie très dure, malgré les rinçages, certainement à cause de l’amidon. Mais ma laine n’était pas seulement dure mais aussi cassante!

Conclusions

Les graines sont donc de bonnes ressources tinctoriales, il faut en profiter.

On reste souvent dans la gamme des beiges, brun rosé, mais on a souvent un mordant naturel qui peut être employé en combinaison avec d’autres plantes.

Ces tons s’harmonisent facilement avec les autres couleurs, ce qui est un avantage.

Raisons pour teindre

Pour quelles raisons teindre?

Après les saisons, je me suis demandée les raisons pour teindre. Elles sont nombreuses et anciennes.

Les raisons de l’histoire

Dès la préhistoire, on trouve des traces de teintures. Les humains avaient déjà certainement de bonnes raisons pour teindre.

Michel Pastoureau, mais surtout Dominique Cardon mentionne des découvertes de plantes qui ne pouvaient être que tinctoriales, par exemple des graines de sureau yèble (toxiques) lors de la fouille des restes d’un village lacustre néolithique en Suisse.

Au Pérou, on a découvert le plus ancien textile teint à l’indigo, il a plus de 6000 ans. Pourtant, l’indigo n’est pas visible dans la plante, il doit être extrait par fermentation.

Des documents sumériens donnent des recettes de teinture à la garance et à l’indigo pour imiter la très coûteuse pourpre animale… Puis, on retrouve ces recettes sur des papyrus égyptiens…

La magie et la religion, une bonne raison?

Les premières utilisations de la couleur, le plus souvent minérale (ocres, argiles, craie, charbon…), pigments retrouvés sur les peintures rupestres et pétroglyphes un peu partout dans le monde.

Mais on retrouve aussi partout les peintures corporelles… protection contre le soleil et certains insectes, pour faire peur aux ennemis, marque d’appartenance sociale, état civil,  de hiérarchie… représentant tout un code, qui sera plus tard remplacé par le vêtement dont la couleur reprendra une partie de ces rôles…

Crèmes de beauté malgaches à base de fruits de baobab
Crèmes de beauté malgaches à base de fruits de baobab

Les tatouages sont aussi des manifestations très anciennes de la couleur, de nombreuses momies égyptiennes (notamment au henné), mais aussi précolombiennes, même Ötzi portent encore ces traces de couleurs…

Importance sociale

Les différentes couleurs jouent un rôle social très important, qui diffère d’une société à l’autre (les perceptions ne sont pas les mêmes), et leur importance et signification évoluent aussi dans le temps. C’est ce qu’explique Michel Pastoureau dans son livre “Jésus chez le teinturier”.

Très vite, certaines teintures grand teint ou prestigieuses on été réglementées. Des lois sur les dépenses somptuaires exitent déjà chez les Romains, et se sont maintenu fort longtemps.

La couleur met en valeur tout ce quelle touche…

Un peu de couleur suffit pour égayer cette pièce. laine teinte au duraznillo, cochenille et indigo
Un peu de couleur suffit pour égayer cette pièce. laine teinte au duraznillo, cochenille et indigo

Raisons pratiques

Certaines laines (et même d’autres fibres, le lin n’est pas parfaitement blanc, le chanvre non plus, le coton était brun, roux, beige ou vert avant d’être blanc, certaines soies domestiques son jaunes ou vertes, la soie sauvage est brune) donnent parfois l’impression d’être sales (Michel Pastoureau parle même de teindre en blanc, ce qui a été longtemps un problème). Une fois teintes, elles sont beaucoup plus jolies (les fileuses de laine à Puerto Montt teignent systématiquement les laines un peu grises ou jaunâtres).

Fibres que j'ai ramene de Madagascar, de bonnes raisons de faire des essais teintures
Fibres que j’ai ramenées de Madagascar, de bonnes raisons de faire des essais de teintures

Et le pratique peut s’allier au plaisir…

Pour le plaisir

C’est toujours un plaisir de pouvoir teindre ou imprimer une matière brute. Et si le résultat n’est pas satisfaisant, on peut recommencer. C’est très amusant de jouer avec les mordants et les modificateurs. Que de surprises!

Ici, la laine tricolore, venait noire et blanche, je l'ai teinte en partie en jaune, l'autre partie en rose (cochenille)
Ici, la laine tricolore, venait noire et blanche, je l’ai teinte en partie en jaune, l’autre partie en rose (cochenille)

Teindre des fils permet aussi de broder des décors, de faire des brocard, des jacquard, des rayures, des écossais, des pieds de poules… du shibori, des ikat… des pochoirs, tampons, sérigraphie (j’oublie certainement d’autres techniques faisant appel à la couleur) et de faire varier ainsi les motifs.

Bonnets avec motifs de couleur
Bonnets avec motifs de couleur

Teindre pour la santé

De nombreuses plantes tinctoriales sont médicinales, peuvent repousser les insectes ou avoir d’autres effets bénéfiques pour la santé, tels que antiinflammatoires…

Les teintures naturelles obligent a travailler surtout avec des fibres naturelles qui sont normalement, si elles ne sont pas cultivées avec des pesticides (ce qui est souvent le cas du coton qui est aussi généralement OGM), sont beaucoup plus saines.

Que teindre?

Je travaille surtout avec la laine, c’est la matière première que j’ai à ma disposition en plus grande quantité, c’est le plus souvent le plus facile à teindre.

Un petit échantillon de teintures sur laine pour vous donner des raisons d'essayer
Un petit échantillon de teintures sur laine pour vous donner des raisons d’essayer

J’ai fait quelques tests sur le coton, la soie, le lin…

Test d'ecoprint sur lin
Test d’ecoprint sur lin

Mais on peut aussi teindre le cuir (en prenant des précautions, à froid), le bois (boutons, perles, par exemple), à Santa Fe, en Argentine, nous avons testé des coquillages, de la céramique, des plumes…

Michel Garcia, dans un de ses livres donne des explications pour teindre de l’osier, du cuir et même du plâtre.

Livre de Michel Garcia, donne de nombreuses idées et mille bonnes raisons pour teindre
Livre de Michel Garcia, donne de nombreuses idées et mille bonnes raisons pour teindre

Comment teindre?

Pour des raisons écologiques mais aussi économique, le mieux est d’utiliser des teintures naturelles, ce qui permet de renouer avec l’histoire et les traditions (les premières anilines datent des années 1850).

Nous devons aussi apprendre à utiliser toutes les vertus des fibres naturellement colorées, il y a des problèmes de blanchissement des troupeaux d’alpagas au Pérou, brebis au Sud du Chili. Il faut rediffuser les cotons anciens de couleur.

Teindre des laines grises ou beige, voir même plus foncées, peut être très intéressant.

Horizontal, laine blanche Vertical, laine jaunâtre ou grisâtre bonnes à teindre
Horizontal, laine blanche
Vertical, laine jaunâtre ou grisâtre bonnes à teindre

Laines blanches et grises et ruban cardé blanc, sortant d'un vieux bain de cochenille et garance inépuisable
Laines blanches et grises et ruban cardé blanc, sortant d’un vieux bain de cochenille et garance inépuisable

Teindre, c’est facile et passionnant

Si même nos plus lointains ancêtres teignient leurs vêtements et biens d’autres choses, pourquoi ne le ferions-nous pas?

De bonnes raisons pour apprendre
De bonnes raisons pour apprendre

Et en plus, on découvre toute la magie de la chimie verte et de la botanique (certaines de nos plantes à teindre peuvent se manger en salade et certaines salades peuvent aussi teindre), il m’est arrivé de teindre avec du coriandre fané, cela m’a donné du jaune.

Quelle surprise voir un bain tourner immédiatement au jaune en ajoutant un peu d’alun, et que dire de l’indigo!

Et, même les enfants peuvent teindre.

Petite fille peignant au choux rouge
Petite fille peignant au choux rouge

Et si on teignait?

Cest une des raisons de l’existence de ce site web. Osons teindre, et faisons-le proprement… Il est temps de passer à l’acte. Il y a beaucoup à faire, faisons-le pendant qu’il en est encore temps.

Je suis entrain d’écouter une conférence du philosophe Bernard Stiegler qui dit que “il faut que les gens retrouve du temps de savoir”. Et, dans mon cas je tente de maintenir des connaissances de gestes et techniques qui sont entrain de se perdre.

Conclusion

On a toujours de bonnes raisons pour teindre, et encore de meilleures pour teindre naturellement, et ainsi d’allier l’utile à l’agréable.

Mes recherches en teintures naturelles m’ont amenée à m’intéresser à la botanique et à l’agroécologie.

Saison pour teindre

Y-a-t-il une saison pour teindre?

A cette date de changement de saison (fin de l’été au Chili), cette question m’est venue à l’idée.

En fin de compte, on peut teindre à n’importe quelle saison, mais le travail de la laine est souvent une activité saisonnière comme la majeure partie des travaux agricoles. La production de la laine est un travail de longue haleine, heureusement il s’agit d’un produit non périssable… Il en est de même pour la soie.

Il y a une saison pour tondre

En général, on tond les moutons au printemps, si possible avant que les plantes ne montent en graines. En effet, celles-ci peuvent s’incruster dans la laine et la rendre très désagréable à filer, d’autant plus que certaines graines de plantes qu’apprécient particulièrement les moutons peuvent être très piquantes (alberjilla, par exemple), d’autres s’emmêlent comme les graines de marubio que les paysans de La Ligua appellent “clonques”, elles sont pourvues de plein de petits crochets et se séparent quand on veut les enlever…

D’autre part, les moutons commencent à avoir chaud, la tradition veut que l’on ne tondent pas un mouton s’il a plu la veille. C’est pourquoi quand j’ai voulu apprendre à tondre les moutons, cette expérience a été reportée plusieurs fois à cause de la pluie, nous avons fini par tondre en janvier, ce qui est un peu tard, à La Ligua.

Tonte d'alpaga au Rancho Kawell, Concon
Tonte d’alpaga au Rancho Kawell, Concon, en fin de saison

Saison de lessives

Il vaut mieux profiter qu’il fait beau pour laver la laine. Mais la laine se file mieux si elle a encore sa graisse (la lanoline). Le lavage avant de filer de la laine de camélidés (alpaga, llama…) est déconseillé, le peu de graisse présente aide beaucoup à la filature de ces fibres très lisses et n’ont presque pas d’odeur.

Le lavage de la laine doit être assez délicat pour qu’elle ne feutre pas, il faut donc éviter les chocs thermiques. Ne pas la sortir brutalement d’un bain bouillant, je laisse systématiquement refroidir jusqu’au lendemain tous les bains de teintures, il doit en être de même pour les lavages. Mais un bon lavage est très important, sinon les teintures, même de grand teint ne se maintiennent pas…

Dans le Sud, que fait-on?

Dans la zone de Puerto Montt, on profite des clôtures en fils de fer barbelés pour étendre quelques temps les toisons aux intempéries qui élimineront la majeure partie de la poussière et un peu de suint. Il faut dire que le climat est très pluvieux normalement dans cette zone. Il faudra bien laver ces laines une fois filées.

Toisons de mouton accrochées sur la clôture au fond du champ
Toisons de mouton accrochées sur la clôture au fond du champ en belle saison

L’été, quelle saison!

Normalement, c’est la saison des ventes aux touristes, il y a beaucoup à faire… Il y a toutes les autres activités agricoles et commerciales…

Mais, cela peut être la saison idéale (avec le printemps) pour teindre, il y a plus de plantes… La laine sèche beaucoup plus vite, ce sont de bonnes raisons pour teindre si on en a le temps. On peut en profiter pour teindre à l’extérieur, c’est l’idéal.

Il faut penser à récolter les plantes, et les faire sécher si on ne teint pas tout de suite. En automne, on peut profiter des feuilles mortes… Chaque plante a sa saison, certaines disparaissent vite après la floraison pour laisser la place à d’autres…

L’artisanat est généralement une activité complémentaire, il est difficile d’en vivre exclusivement, d’autant plus qu’il s’agit d’une activité dévoreuse de temps. Et celui-ci n’est pas valorisé ici.

Saison pour filer

Avant de commencer à filer, il faut bien sélectionner les laines… Tous les moutons n’ont pas une bonne laine. Les brebis ont généralement une laine plus fine et plus agréable que les béliers… on doit souvent réserver leur laine pour faire des tapis (je me rappelle d’un bélier noir et blanc que j’avais tondu avec mon amie Raquel à Mamiña, il était beau, mais sa laine était très rèche, les brebis avaient une laine courte, mais très douce, on était obligé de la rincer avant de la filer à cause de la poussière acide qui venait de la mine de cuivre à 15 km, qui me fendait la peau des doigts quand je filais.).

Bélier à laine rèche, au premier plan, à gauche
Bélier à laine rèche, au premier plan, à gauche

Outre les différentes races, sur une même brebis, il y a différentes qualités de laines, il y en a de très sales, des courtes, des longues.

Entrain de sélectionner la laine pour la laver avant de la teindre en toison pour la carder
Entrain de sélectionner la laine pour la laver avant de la teindre en toison pour la carder

Les laines les plus courtes donneront des fils plus épais, les laines plus longues permettent de filer plus fin.

Photo

A Puerto Montt, les fileuses de laine, ne veulent que la meilleure laine, elles éliminent les pattes, la queue, le ventre, les laines courtes… Pour acheter 10 sacs de laines, elles en vident 25… D’autant plus que le Ministère de l’Agriculture, ici encourage à élever des moutons pour la viande (ils doivent avoir la laine courte, ne pas avoir de laine sur le ventre…), résultat: les brebis noires et grises locales (bien adaptées au climat et qui donnent de très bonnes laines) disparaissent. Il est vrai que le prix des toisons est dérisoire et que maintenant beaucoup ne savent pas quoi en faire, bien que beaucoup de femmes, ici, tentent d’arrondir leurs fins de mois en filant.

Nous n’avons malheureusement pas de jardin, sinon tous ces déchets de laine constituent un paillage très intéressant, je l’avais testé à Mamiña, en plein désert d’Atacama, j’avais abandonné pendant trois mois de voyage, la menthe avec un paillage de laine, et je l’ai retrouvée bien verte… La laine retenait l’évaporation de l’eau.

Menthe avec paillage de déchets de laine de llama et restes végétaux de teinture naturelle
Menthe avec paillage de déchets de laine de llama et restes végétaux de teinture naturelle

A Puerto Montt, nous avions aussi semer des pommes de terre dans des sacs de déchets de laine, ceux-ci venaient parfois avec des crottes de moutons. J’étais en voyage quand elles ont récolté et mangé les pommes de terre.

Pommes de terre qui poussent dans un sac de déchets de laine brute
Pommes de terre qui poussent dans un sac de déchets de laine brute

Que faire après la sélection?

Après la sélection, vient la préparation de la laine pour la filer. Le rêve de toutes les fileuses de laine est d’avoir une machine à carder. Elles ne sont pas toujours très efficaces. Sans moteur, c’est très fatiguant.

La première que nous avons achetée très chère, a les piquants trop petits et trop mous. Nous pensions pouvoir louer le temps d’utilisations aux femmes qui en avaient besoin. Mais la machine n’admet pas les laines sales. Même les laines propres doivent être ouvertes, préparées… sinon la machine se bloque. Enfin de compte, il faut lui faire avaler du ruban cardé à petite dose! c’est une machine pour artiste, pour mélanger des laines déjà cardées, rajouter de la soie, faire des mélanges de fibres…

Utilisation de la machine à carder, photo prise par une cliente de Rincón de Angel
Utilisation de la machine à carder, photo prise par une cliente de Rincón de Angel

Machine à carder inadaptée aux besoins locaux
Machine à carder inadaptée aux besoins locaux

J’ai fini par me faire faire un appareil que je traite de Viking, vu qu’il s’inspire d’appareils à carder qu’ils utilisaient. Il s’agit de deux planches avec des clous, l’une fixe, l’autre mobile, on y met la laine par petits paquets, on tire la planche mobile vers soi et la laine est presque prête à filer.

Préparant la laine lavée avec l'appareil
Préparant la laine lavée avec l’appareil “viking”

Chez Rincón de Angel, nous avons eu à la vente une machine à carder, dotée de rouleaux avec des clous, un peu plus efficace, mais je n’ai pas osé l’essayer avec de la laine brute.

Machine à carder à clous
Machine à carder à clous

En tout cas, la cardeuse n’élimine pas les déchets de végétaux, qui peuvent être nombreux si les animaux sont enfermés (souvent le fourrage est distribué dans le même enclos), vont se frotter contre des buissons épineux ou si la tonte n’a pas été faite dans un endroit propre.

Machine à carder à clous,plus efficace, je l'ai testée avec de la laine d'alpaga brute, des petits poils ont volé dans tous les sens
Machine à carder à clous,plus efficace, je l’ai testée avec de la laine d’alpaga brute, des petits poils ont volé dans tous les sens

Le résultat doit encore être préparé en petits rouleaux de mêche de cardage pour la filature
Le résultat doit encore être préparé en petits rouleaux de mêche de cardage pour la filature

Le plus simple est donc de préparer la laine à la main, cela permet d’éliminer un maximum de pailles, graines et autres déchets… Il faut éliminer toutes les pointes brûlées par le soleil et les poils plus durs. Tous ces déchets ont des noms en aymara. Tout ce nettoyage prend son temps et élimine du poids de laine. Une fois filée, le poids de la laine a diminué au moins de la moitié.

Laine d'alpaga prête à filer et petit fuseau
Laine d’alpaga prête à filer et petit fuseau

Cette étape est très longue, mais très importante, elle influe directement sur la qualité finale de la laine.

Mieux la laine est préparée, plus le résultat sera régulier, solide et agréable. Une bonne préparation permet aussi de filer une laine plus fine. La filature sera beaucoup facilitée par une préparation minutieuse.

Enfin la filature

Là, nous avons deux options: le fuseau ou le rouet.

Je préfère filer au fuseau, bien que cela soit beaucoup plus long, je peux le faire même en marchant… on contrôle mieux le résultat, bien que je ne recherche pas à obtenir un fil très lisse, presque industriel… Plus on file fin, plus ce travail est long.

Raquel, une amie Aymara de Mamiña montrant comment on file
Raquel, une amie Aymara de Mamiña montrant comment on file

Le rouet, peut être à pédale ou électrique. Il est plus rapide, mais la préparation de la laine est alors encore plus importante, car la machine ne laisse pas le temps d’éliminer les impuretés, graines, pailles… Le rouet a aussi tendance à trop tordre la laine, ce qui la rend dure et difficile à travailler.

Rouet électrique à poser sur une table et
Rouet électrique à poser sur une table et “aspa” pour préparer les écheveaux

Rouet à moteur électrique
Rouet à moteur électrique

Rouet à pédale
Rouet à pédale

En général, ici on file surtout en automne et en hiver, souvent les femmes se réunissent en “minga” pour filer. Les hommes aussi filent.

Le lavage intervient le plus souvent après la filature, il doit être minutieux pour enlever un maximum de graisse car celle-ci pertube la teinture. Traditionnellement, les femmes faisaient souvent bouillir la laine.

Ce dégraissage est aussi important, car si la laine reste trop longtemps avec sa graisse, celle-ci s’oxyde et jaunit la laine.

Pour mieux filer une laine lavée en toison, il peut être judicieux de l’humidifier, cela facilite la filature.

Une fois la laine filée, si elle est sale, il faut la mettre en écheveaux pour la laver et la teindre, si elle est propre et qu’on la garde nature, on peut faire des pelotes. On peut teindre des pelotes, mais il faudra les défaire pour les faire sécher.

C’est ce que je faisais à Longotoma, c’est très long… Je filais la laine une fois lavée, et je file en préparant déjà une bobine…

Laines enrain de sécher â Longotoma
Laines enrain de sécher â Longotoma

Et, la teinture?

La teinture intervient donc souvent un an après la tonte au retour de la bonne saison.

En général, on teint la laine une fois filée. On peut la teindre en toison, la teinture est plus profonde, mais celle-ci doit être bien dégraissée, elle est plus difficile à filer après.

Quand je vivais à Mamiña je pouvais teindre à peu près n’importe quand, sauf pendant les étés pluvieux (hiver altiplanique). Il y avait beaucoup de vent, en un jour ou deux les laines étaient sèches.

Laine entrain de sécher à Mamiña
Laine entrain de sécher à Mamiña

A Puerto Montt, il pleut presque toute l’année. Presque tout le monde utilise des cuisinières à bois, c’est très pratique pour teindre, surtout avec les plantes où il faut de longs temps de décoction.

Quand on teint avec des pigments naturels déjà préparé ou avec la cochenille, on ne dépend plus de la saisonalité des plantes…

Pas de saison pour l’ecoprint

Vu le peu de matériel végétal nécessaire pour l’ecoprint, on peut le pratiquer en toute saison, dans une casserole dédiée à cet usage, dans la cuisine… S’il fait froid, mieux vaut laisser tremper plus longtemps.

Quand je suis allée à Madagascar, c’était déjà le début de l’hiver (mai 2017), nous avons trouvé beaucoup de plantes intéressantes, les feuilles de rosiers, par exemple…

Mon ami Hilaire, découvrant un ecoprint sur une de ses écharpes de soie
Mon ami Hilaire, découvrant un ecoprint sur une de ses écharpes de soie

On peut aussi faire les poubelles du fleuriste du quartier, ou mieux se mettre d’accord avec lui, les déchets exploitables en toute saison sont nombreux et variés, de quoi tester de nombreuses plantes…

Conclusion

La teinture puis le tissage sont donc très rapides en comparaison au temps nécessaire à la préparation de la laine et à la filature. Si la laine est plus propre et mieux filée, elle se tricote ou tisse plus facilement.

Quand on voit une pièce artisanale terminée, il faut cumuler tous ces temps de travail et d’attente. Qui se donne la peine de faire cette analyse?

L’étape la plus longue semble être la vente du produit fini.

Translate »
Open chat
1
Je suis attentive à vos commentaires
Estoy atenta a sus comentarios
I'am waiting for your comentaries